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même race, mis au même régime et aux mêmes travaux, restent maigres et en mauvais état ; cette différence n’est pas toujours due à des maladies, elle tient au contraire, le plus souvent, à la différence de conformation. Ce doit être ici l’objet d’une étude qui est longue et difficile, mais qui est des plus importantes pour faire de bons choix, soit qu’on veuille engraisser les animaux, soit qu’on en veuille tirer parti pour le travail.

On ne s’est encore occupé de déterminer des mesures exactes pour la belle conformation, que relativement au cheval. (Voyez Beauté, Bonté.) Au reste, il y a une grande différence du beau idéal avec la conformation dans laquelle on ne recherche qu’une solidité suffisante pour permettre l’engraissement.

Un bœuf d’une bonne conformation pour l’engrais a la corne fraîche, l’encolure épaisse, le fanon flottant, la poitrine large, la côte élevée en arc, le ventre rond, soutenu, le dos horizontal, enfin les jambes, les épaules et les cuisses très-épaisses.

Le cochon de race commune a le corps trop long ; il relève le dos en arc, est gêné dans la marche ; quand elle doit être longue pour chercher ses alimens, se fatigant beaucoup, il s’engraisse moins. La parcimonie avec laquelle on élève les porcs, les voyages qu’on leur fait faire pour les conduire dans des marchés éloignés, occasionnent des mortalités chez les particuliers qui en achètent pour les engraisser.

3°. États favorables ou Contraires à l’engraissement. La première condition sans laquelle il n’y auroit point d’engraissement, c’est qu’il faut que l’animal répare ses pertes ; la seconde c’est que les organes qui exécutent la nutrition soient modifiés de manière à élaborer et à conserver la matière graisseuse qui excède la réparation de ces mêmes pertes. Or, ces deux conditions ne seront pas remplies, si les organes, sur-tout de la nutrition, de la digestion, de la respiration, etc. ne jouissent de leur intégrité et de toute leur action.

Signes de la santé. Les signes principaux qui indiquent que l’animal est en santé, sont la marche libre, la légèreté, la gaîté, le grand appétit ; les excrémens de consistance moyenne, sortant avec régularité et sans contrainte ; la transpiration exhalant une odeur forte, mais douce, dont la matière reste long-temps à la main qu’on a appliquée sur la peau ; la couleur rose-pâle des membranes de la bouche et des naseaux, etc. ; dans le bœuf, la vache, la rumination régulière, etc.

La faculté de prendre graisse exige donc une bonne constitution et une bonne santé ; l’une et l’autre permettent même de perdre et de reprendre plusieurs fois la graisse ; et l’on voit qu’ainsi la surabondance graisseuse peut se concilier avec une longue vie.

Constitution trop faible, organes lésés. Mais, si l’animal est constitué d’une manière par trop foible, si les organes évaporateurs ont éprouvé des lésions considérables, il ne peut engraisser une première fois, ou, s’il a perdu sa graisse, il ne peut la reprendre. Ces causes déterminent encore la conversion de la graisse en cachexie aqueuse plus ou moins marquée, ce qui est d’observation, sur-tout dans le mouton.

On reconnoît une constitution foible au défaut d’aplomb, à la foiblesse des membres, à la roideur de l’épine dorsale et lombaire, au bercement de la croupe, au flageolement des extrémités.

Les lésions des organes s’annoncent par le défaut de gaité, de souplesse ; la respiration qui s’accélère extrêmement après un long exercice ; parce que l’animal, conduit en liberté, marche à la suite de ses compagnons ; parce qu’il ne fait aucune résistance quand on le contraint ; parce que son appétit et ses déjections varient fréquemment ; qu’il a des goûts dépravés, qu’il mange la terre, lèche les murs ; qu’il a le poil terne, piqué, la peau adhérente aux os, avec une petite toux. (Voyez Amaigrissement, Pommelière, Fureurs utérines, Hydropisie, Pourriture, Gale, etc.)

On a vu souvent le défaut de connoissance dans le choix des animaux, être la cause de la ruine de beaucoup de marchands.

Âge, Les animaux, avant d’avoir achevé leur accroissement, prennent la graisse d’une manière moins complète, parce qu’une partie des alimens donnés pour engraisser, ne sert qu’à les faire croître.

Les bœufs qu’on soumet au travail jusqu’à dix à douze ans, ont la chair dure, sèche, moins bonne, s’engraissent lentement et avec plus de dépense.

L’âge le plus convenable pour l’engraissement est donc celui où l’animal a acquis le développement propre à son espèce : cette époque pourroit être fixée pour le mouton et la bœuf, au temps où toutes les dents d’adulte sont sorties ; mais on peut, sans beaucoup d’inconvéniens, avancer un peu cette époque, pour les moutons qu’on nourrit sur-tout pour la chair, sans rechercher autant le profit que procurent la laine et le fumier ; de même qu’on