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résultats ne sont plus à craindre, si les semences ont été emballées parfaitement mûres et sèches.

Le hasard a fait découvrir à M. Suedz un moyen de conserver aux semences leur propriété végétative, et de les transporter dans les climats les plus éloignés. Ayant reçu des graines qui, en général, croissent difficilement en Angleterre, lorsqu’on les y porte par la voie ordinaire, et qui se trouvoient mêlées parmi des raisins secs, il les sema dans des pots recouverts avec des châssis : toutes levèrent. Content de ce succès, il chargea ses enfans, qui étoient alors en pays étranger, de ramasser toutes les graines qu’ils pourroient se procurer, et de les lui envoyer, empaquetées dans du papier-gris, enveloppées ensuite, les unes avec des raisins secs, les autres avec du sucre bien humide ; cette commission fut remplie à la lettre, et, de vingt espèces qu’il sema, pas une n’a manqué ; tandis que les mêmes graines, qui lui furent envoyées emballées à la manière ordinaire, ne levèrent point. L’auteur attribue cette propriété à la faculté qu’ont les raisins d’exhaler de l’humidité, que le mucoso-sucré qui transude des raisins de caisse, on le sirop que forme un sucre humide, vernissant les semences, les garantissent de l’impression de l’air, de l’action qu’exerceroient alternativement sur elles la sécheresse qui dissipe leur esprit séminal, et l’humidité qui l’altère. Or, ces semences confites, pour ainsi dire, dans le sucre, s’y trouvent dans le même état d’inertie que les pépins enfermés dans leur chair séchée avec l’intention de les faire lever plus sûrement, et qu’ils y sont mieux défendus contre les agens qui diminuent ou détruisent la faculté générative des semences en général, même de celles qui sont gardées dans des capsules ou autres enveloppes plus perméables. Ne sait-on pas, en effet, que lorsqu’on peut mettre entièrement les semences à l’abri de ces agens destructeurs, lorsqu’elles sont, par exemple, enfouies profondément dans la terre, elles conservent cette faculté pendant des siècles ? Nous pensons que ces fruits agissent ici de différentes manières, soit parce que l’humidité qu’ils exhalent est vineuse, soit parce qu’ils servent de corps intermédiaires, de capsule à la graine.

Nous ne nous permettrons pas de grossir cet article, déjà trop long, par la description d’une foule d’autres recettes insignifiantes, qui se trouvent disséminées dans les ouvrages périodiques. Ne pourroit-on pas avancer qu’il en est de certaines recettes vantées pour conserver les graines, comme de celles de ces médicamens qui doivent leur réputation aux circonstances, plutôt qu’à leur efficacité réelle ?

Il ne suffit pas d’avoir récolté en bon état les graines, de les avoir parfaitement séchées et soigneusement renfermées, il faut les visiter de temps en temps, parce que si on s’apercevoit qu’elles fussent attaquées par des insectes, il seroit nécessaire de profiter d’un beau jour pour les étendre au soleil, les nettoyer, les cribler autant de fois que le besoin en est indiqué, et ensuite les remettre en sac.

Mais, an printemps, lorsque la végétation commence à reprendre son activité, la surveillance devient encore plus nécessaire ; on diroit que les principes vivifians et fécondans qui, à cette époque, semblent pénétrer toutes les parties de la matière organisée, exercent aussi leur influence sur les graines : on remarque du moins un mouvement sensible de fermentation dans plusieurs espèces, telles que les radis, les choux, les navets et les haricots.

Les graines de laitue particulièrement, ont encore plus besoin de cette visite, parce qu’elles sont fréquemment attaquées par un petit ver ou larve qui s’en nourrit, et qui les ramasse par petites pelotes, dans l’intérieur desquelles il se