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seur, excède celle d’une lentille ; ils s’étendent sur toute la surface du corps, et principalement sur le garrot et le cou ; ils sont rarement isolés ; ils se réunissent plusieurs sur le même point où l’on voit la place de leurs morsures : toutes ces surfaces sont piquées et irritées tant de la part des poux que de celle des tiques. Ils tourmentent les moutons jour et nuit, les empêchent de manger et de reposer, et il en résulte une fonte assez prompte de la graisse. Au surplus, les agneaux, même les antenois, sont plus exposés à être la proie de ces insectes, que les moutons adultes.

Il est très-difficile, pour ne pas dire impossible, de soigner un troupeau de moutons à laine superfine, assez bien pour le garantir entièrement de toute éruption de gale ; mais, dans un troupeau bien entretenu, les pustules qui sortent d’un moment à l’autre sur quelques moutons peuvent être arrêtées et guéries pour ainsi dire à l’instant de leur apparition. L’objet essentiel est que le berger le recconoisse aussitôt c’est à quoi il parvient facilement, s’il n’abandonne jamais les moutons, et s’il a constamment les yeux dessus. Cette éruption de pustules galeuses n’est pas de sa faute ; il n’est coupable, à cet égard, qu’autant qu’elles sont multipliées, que la maladie a fait des progrès ou qu’elle est répandue sur beaucoup de bêtes. En ce cas, plus le nombre des animaux affectés est considérable, plus on a de reproches à lui faire, parce qu’alors c’est une preuve ou de son ignorance, ou de son insouciance et de sa paresse. Il préviendra encore l’éruption de cette maladie, en entretenant, dans la bergerie, une température douce qui ne soit ni froide ni chaude, et en évitant que ce local n’exhale une odeur forte de mouton ; il en est ainsi, lorsque la bergerie est nettoyée souvent et que l’air la traverse sans obstacles.

Pour s’opposer à l’éruption de cette maladie, le berger doit éviter avec le plus grand soin d’échauffer les moutons, en les faisant ou en les laissant marcher trop vite. Ils doivent être conduits de manière que leurs mouvemens ne soient jamais plus pressés dans un temps que dans l’autre, soit qu’il les conduise au pâturage, soit qu’il les ramène à la bergerie.

Une autre attention non moins importante, sur-tout en hiver, c’est d’éviter, autant qu’on le pourra, que les toisons ne soient mouillées à fond ; plus la toison est tassée et serrée, plus elle a de peine à sécher. Si l’humidité qu’éprouve alors la peau de ces animaux se proroge pendant cinq, six, ou même vingt jours, elle est presque toujours suivie de l’éruption de la gale.

En ce qui concerne la nourriture, elle doit être réglée de manière que le troupeau soit toujours en bon état, jamais maigre, et jamais gras. Cette attention à éviter les extrêmes est de la plus grande importance pour la conservation de la santé, sur-tout des troupeaux que l’on destine à former des élèves et à produite des laines fines.

Tout animal de cette espèce, qui a dépéri, est sujet à avoir la gale, lorsque son embonpoint lui est revenu par une nourriture abondante ; de même que le mouton chargé d’une certaine graisse éprouvé rarement une diminution un peu prompte et considérable dans son embonpoint, sans être atteint de la gale ; et l’un et l’autre état sont souvent suivis de la maladie que l’on nomme pourriture ou cachexie aqueuse.

Ces changemens fâcheux ont souvent lieu, lorsque les moutons passent de la nourriture sèche, qui les a fait maigrir, à la nourriture verte qui les engraisse ; époque où la nouvelle laine pousse avec force, et où quelquefois l’ancienne tombe.

Traitement de la gale. Lorsque le berger s’aperçoit qu’un de ses moutons est affecté de la gale, il doit le saisir sur-le-champ, le fixer de manière à pouvoir fouiller la toison, et reconnaître la partie de la peau qui porte les bourgeons. Il doit ouvrir la toison dans l’endroit répondant aux pustules, et arracher la laine qui les recouvre ; il en déchirera et enlèvera avec l’ongle les sommités ; il fera un pli à la peau, prendra ce pli à deux mains entre chaque pouce et chaque index, le pressera, le frottera pour faire sortir l’humeur jaune et séreuse que contenoit la pustule ; alors il versera sur le lieu affecté quelques gouttes d’huile empyreumatique préparée (ainsi qu’il va être expliqué ci-après), puis il approchera la toison et il l’égalisera, en sorte que rien n’indique que l’animal ait été pansé. Il fait le même pansement sur les autres pustules, s’il y en a ; et cette seule opération suffit, lorsqu’elle est bien faite, pour arrêter la maladie.

Mais, si les pustules sont multipliées, soit sur le corps de l’animal, soit sur une grande quantité de bêtes, il faut séparer le plus tôt possible les animaux affectés de ceux qui ne le sont pas, afin d’éviter la communication du mal d’une bête malade à une bête saine.

Cette opération exige une revue générale du troupeau. Il faut nécessairement que tous les animaux qui le composent soient examinés à fond ; on prend chaque mouton en particulier,