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dans leurs opérations de culture ; et quoiqu’ils ne puissent pas ordinairement les lier ensemble pour en déduire une théorie raisonnée, ils n’en ont pas moins l’intime conviction que ce qu’ils font est bon et avantageux.

Je sais bien que si vous demandez à beaucoup de cultivateurs des campagnes : Pourquoi faites-vous ainsi telle opération ? la plupart vous répondront : nos pères ont fait ainsi ; nous suivons leur exemple. Mais je sais aussi, et j’en ai souvent acquis la preuve, qu’un assez grand nombre vous donneront des motifs plus ou moins bien fondés de leurs opérations. Les vignerons, les forestiers, les tailleurs d’arbres fruitiers, et sur-tout les jardiniers, vous diront également la raison de leur manière d’opérer. Beaucoup de ces raisons sont mauvaises, sans doute, parce qu’elles sont, pour l’ordinaire, en contradiction avec les lois de la physique et de la physiologie végétale ; mais enfin ils les ont ou retenues de leurs maîtres, ou apprises eux-mêmes par l’observation. Ils ont donc, comme tous les autres hommes, la faculté d’observer et de combiner des idées, et d’en tirer des conséquences plus ou moins exactes.

Il n’est pas possible, sans doute, de faire des savans de tous les cultivateurs, et il n’est pas, à beaucoup près, nécessaire qu’ils le soient ; mais ils doivent tous avoir les connoissances que comportent leurs fonctions respectives. Les agriculteurs, en général, peuvent se diviser en trois classes : celle des grands propriétaires qui cultivent eux-mêmes, et des fermiers qui dirigent une grande exploitation ; celle des propriétaires et des fermiers d’une étendue de terre moins considérable, et celle des journaliers et des petits cultivateurs. Chacune de ces classes doit avoir des connoissances plus ou moins étendues ; et l’instruction doit être, par conséquent, très-différente. Nous allons indiquer celle qui