Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/413

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ainsi, l’on voit que la nature des substances végétales, leur état de maturité, et le degré de combustion qu’on leur fait subir, influent d’une manière extrêmement marquée sur la quantité des produits qu’on doit en obtenir.

Quelques familles de plantes paroissent s’approprier certains sels qu’on y retrouve constamment ; les phosphates existent plus abondamment dans les végétaux des marais, le sulfate de soude dans le tamarisc, la soude, le muriate de soude, le sulfate de magnésie dans les plantes marines, et les sulfates de potasse et de chaux dans les bois des forêts.

Les cendres sont, pour les terres, un précieux engrais dont on n’a pas encore assez apprécié l’heureuse influence ; mais leur emploi le plus important est de fournir aux manufactures et aux arts la potasse et la soude, dont on fait un grand usage dans les verreries, les savonneries, les fabriques de salpêtre, les imprimeries, les teintures, etc.

Les cendres de toutes les substances végétales sont composées de silice, de magnésie, de chaux, de potasse, de soude, des acides sulfurique, muriatique, phosphorique, carbonique, et des oxides de manganèse et de fer.

Je laisse aux agriculteurs à décider si la chaux et le plâtre agissent d’une manière aussi puissante que la potasse dans la végétation ; mais ces substances ayant des propriétés très-différentes, il n’est plus permis de les confondre. (I. L. R.)

Cendres, (Économie rurale.} Dans l’article rédigé par Rozier, cet auteur a reconnu les propriétés des cendres de tourbe comme engrais, et sur-tout de celles que l’on désigne, à cause de leurs effets, sous les noms de houille d’engrais, terre, tourbe, cendres rouges ; mais il n’est entré à cet égard dans aucun détail ; on sait que c’est un amas immense de tourbe pyriteuse qui, étant amoncelé à l’air, s’y enflamme bientôt, en laissant pour résidu des cendres rouges, d’où l’on retire, au moyen de la lixiviation, des sulfates de fer et & d’alumine. Ces cendres, dédaignées autrefois, sont maintenant l’objet d’un commerce considérable pour les cantons où il y a des houillières ouvertes. On assure qu’il s’en débite, dans le seul département de la Somme, plus de trois cent mille setiers qui remontent par la Seine et là Marne jusqu’à Château-Thierry. Les qualités que doivent avoir ces cendres sont d’être fort rouges, légères, fines, et d’une saveur styptique.

Quoique toutes les cendres ne puissent pas servir indistinctement avec profit dans le blanchissage du linge, dans les verreries, dans les savonneries, dans les teintures, vu le peu d’alcali que la plupart contiennent, il n’y en a cependant aucune dont l’agriculture ne puisse tirer parti, quelle qu’en soit l’origine. L’expérience a démontré combien leur emploi est utile dans les terrains où la glaise domine ; c’est à elles qu’on doit la fertilité des campagnes situées au pied du mont Etna et du Vésuve. Il convient donc de les inscrire au rang des plus puissans engrais jour les terres fortes et humides. Fabroni les compare à la marne, et il prétend qu’il n’y en a point qui réunisse autant d’avantages ; mais ce sont sur-tout les cendres de tourbe qui ont une efficacité reconnue sur les prairies, et dont on fait, pour cette raison, un commerce fort étendu dans quelques cantons, sous le nom de cendres de mer. Il ne sera question ici que de cette espèce.

Cendres de tourbe. Indépendamment des secours que les tourbes peuvent porter dans les arts et métiers, et chez les pauvres des villes et des campagnes où le bois est rare, elles pourroient, dans leur état naturel, servir d’engrais, comme le tan et d’autres matières végétales réduites par la succession des temps à