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damment répandue dans la nature, qu’il n’y a pas d’arbres, d’arbrisseaux, ou de plantes, qui ne la contiennent, soit dans l'écorce, soit dans les feuilles, soit enfin dans le fruit ; on peut donc se dispenser de songer à cette dernière ressource, dans la culture de la cameline.

Cependant, quand on considère que l’huile de cameline, quoique, dans le commerce, son prix soit inférieur à celui des autres huiles, appartient à une plante qui en donne une très-grande quantité ; qu’elle peut se semer dans des terres sèches et légères sur lesquelles le lin ne réussiroit point ; qu’elle supplée les récoltes avortées, et en fournit deux, dans un cas urgent, à cause de l’extrème promptitude de sa végétation et du peu qu’elle exige du sol, on a droit d’être étonné, formalisé même, que la cameline, qui réunit tant d’avantages, soit encore dédaignée dans les endroits et dans les circonstances où elle pourroit remplacer le colza, la navette, l’œillette.

Mais, supposons que l’huile de cameline ne soit propre qu’à la lampe, et que ce soit par fraude qu’on en allonge l’huile de colza pour dégraisser les laines, ne pourroit-on pas espérer que la chimie vînt à bout de la rendre moins grossière ? M. Lendormy, médecin à Amiens, que la mort vient de frapper au milieu d’une carrière brillante et distinguée, à qui les objets d’économie n’étoient point étrangers, a obtenu quelques résultats qui lui faisoient croire que, si, avant l’extraction, on laissoit macérer la graine dans une lessive alcaline, il seroit possible de parvenir à l’améliorer.

Les hivers rigoureux des années précédentes ayant détruit un grand nombre de noyers et beaucoup d’oliviers, on a songé à réparer cette perte, en introduisant dans les cantons du midi de la France des plantes annuelles, telles que le pavot, la navette ; mais la cameline dont l’huile est destinée à brûler ou à dégraisser les laines, ou à fabriquer des savons, doit être adoptée dans tous les endroits où les gelées tardives détruisent ces dernières plantes.

Les expériences faites par M. Mesaize, professeur de chimie, sur la graine de pavot semée et récoltée dans les environs de Rouen, ne permettent plus de douter que, dans tous les cas, on peut substituer l’huile qu’on en retire à celle d’olive ; qu’elle est d’une grande utilité dans les arts, et qu’il seroit bien à désirer que cette plante fût cultivée dans le département de la Seine-Inférieure.

Peu d’auteurs ont traité ce sujet avec plus d’étendue, de clarté et de connoissances positives, que Rozier ; l’article Huile renferme des découvertes précieuses, et de grandes vues sur ce liquide et sur les végétaux propres à le fournir ; c’est précisément à cause de cette circonstance que je me permettrai d’ajouter, à la suite d’une plante qu’il avoit oublié de décrire, quelques considérations sur la même matière ; il convient que le Cours complet d’Agriculture offre le résumé de toutes les notions que nous possédons sur les huiles, et de toutes les vues présentées relativement à cette branche de l’industrie agricole et du commerce national.

Il existe une quantité considérable de végétaux dont le fruit ou la semence contient de l’huile, qui varie à raison du corps d’où elle est exprimée, et du procédé employé à son extraction ; ce n’est qu’en brisant les cellules qui la renferment qu’on peut parvenir à l’avoir à part ; mais, dans cette opération, absolument mécanique, c’est l'écorce et le germe qui produisent les nuances de qualité qui caractérisent ce fluide, et auxquels les huiles des plantes de la famille des crucifères doivent cette saveur si frappante de chou et de rave, qu’il n’est guères possible de méconnoitre dans