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roit retirer dans les aménagemens que nous leur avons fixés, il seroit encore plus grand, si ces bois étoient aménagés à deux cent vingt-cinq ans, parce qu’étant administrés comme nous l’indiquerons à la section des futaies, cet aménagement produiroit encore une bien plus grande quantité de matières, et de dimensions susceptibles de supporter de plus grands frais de transport, que dans les premiers aménagemens.

En travaillant à cet Ouvrage, notre but a été d’éclairer tous les propriétaires de bois sur le grand intérêt qu’ils ont à aménager leurs bois de la manière la plus convenable et la plus avantageuse ; mais il faut convenir que cet intérêt n’est de la plus grande importance que pour les seuls grands propriétaires de bois, c’est-à-dire pour ceux qui possèdent assez de bois pour pouvoir en couper annuellement une certaine quantité. Avec les aménagemens que nous proposons, ils en couperont, chaque année, un moindre nombre d’arpens que dans des aménagemens plus rapprochés ; mais aussi le moindre nombre leur produira un revenu plus considérable ; au lieu qu’un propriétaire qui ne possède qu’une pièce de bois d’une petite étendue, si elle est de la quatrième classe, il ne pourra jamais se déterminer à attendre quarante à cinquante ans pour la couper ; il craindra toujours de ne pas exister à l’époque de sa maturité, et il voudra en jouir au moins une fois dans sa vie.

Section V. Discussions sur les futaies. Les futaies sur taillis et les futaies pleines, adoptées par l’ordonnance de 1669, ont encore leurs partisans et leurs détracteurs ; et tous ont fondé leur opinion sur des faits isolés dont ils n’appercevoient pas les causes, parce qu’en général ils n’avoient pis assez d’expérience pour les découvrir.

Nous allons examiner les avantages et les inconvéniens des unes et des autres, et indiquer le parti que l’on peut en tirer pour préserver la France de la disette d’anciens arbres forestiers, dont elle est menacée.

§. Ier. Futaies sur taillis. Les détracteurs des futaies sur taillis, parmi lesquels il faut compter Duhamel, Buffon et Rozier, appuient leur opinion, 1°. sur ce que, par leur ombrage et leurs racines, elles occasionnent le dépérissement d’un grand nombre de souches dans les taillis ; 2°. quelles y forment des vides d’autant plus multipliés, après leur coupe, que le nombre des réserves y est plus grand ; 3°. que la tige de ces arbres est moins longue et plus noueuse que celle des arbres des futaies pleines.

Tous ces défauts des futaies sur taillis existoient sans doute sur les bois observés par ces savans estimables, lorsqu’ils les ont reprochés à ce genre d’aménagement, parce qu’il ne convient pas également aux bois de toutes les classes. C’est même cette espèce d’uniformité d’aménagement que l’ordonnance de 1669 a établie pour les bois de toutes essences, sans avoir égard à la qualité du terrain, qui la rend défectueuse. Effectivement, à l’époque particulière où Duhamel et Buffon ont écrit sur les bois, les forêts de la France étoient, en général, meublées d’une grande quantité d’arbres de différens âges sur les taillis. Ces arbres avoient peu de hauteur de tige, mais une grande largeur de tête qui occasionnoit des vides dans les taillis. C’est sur-tout dans ceux aménagés de dix à vingt ans, que tous les défauts des futaies sur taillis se faisoient particulièrement appercevoir. Elles y étoient d’ailleurs en trop grand nombre : l’ordonnance le vouloit ainsi.

Mais si ces hommes célèbres avoient observé des futaies sur des taillis de classe requise, et convenablement aménagés, ils auroient vu que la hauteur de la tige et la largeur de fa tête des arbres qu’on y réserve, sont subordonnées à l’âge d’aménagement de ces taillis, et celle observa-