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La vache du pauvre, qu’il mène la plus grande partie de la journée pâturer à longe, sur les bords des chemins, n’est point sujette à l’avortement ; cela vient de ce qu’elle aspire un air pur, et qu’elle n’est pas nourrie suivant le régime dont nous nous plaignons. Dans les pays où les vaches paissent dans les pâturages toute l’année, elles n’avortent pas non plus, à moins qu’on oublie de les en retirer, lorsque l’herbe est couverte de gelées blanches, et sur-tout de les éloigner des endroits marécageux, lorsqu’il y règne des brouillards lourds et épais.

Les vaches qui s’abreuvent ou simplement marchent dans des endroits où elles s’enfoncent dans les terres grasses, très-humides, qui pâturent dans des étangs fangeux, sont obligées de faire des efforts considérables pour dégager de la vase leurs jambes de devant ; ces efforts portent essentiellement vers la région des lombes et causent à la matrice, et à toute l’économie, des ébranlemens qui peuvent faire détacher le fœtus, sur-tout quand la gestation est avancée ; telle est influence des causes générales de l’avortement.

L’avortement ne se déclare souvent que quelque temps après que les causes ont cesse. La chaleur et la sécheresse excessives de l’été sont suivies de l’avortement dans l’automne, ou l’hiver suivant ; les coliques ou l’indigestion ne sont souvent avorter qu’un mois ou deux après qu’elles sont guéries ; les vaches n’avortent que long-temps après avoir été retirées des marais et des pâturages malsains.

La jument avorte si on la fait saillir quand elle est pleine, et plus la gestation est avancée, plus l’avortement suit de près le congrès.

Les brebis avortent, lorsqu’elles passent subitement de la disette à une nourriture substantielle, lorsqu’après un été très-sec, elles éprouvent des pluies froides sur la fin de l’automne. Les bergeries basses, chaudes et humides, sont aussi très-funestes à la mère, ainsi qu’à la production ; mais les causes qui agissent d’une manière plus prompte sur le fœtus sont les compressions que les brebis éprouvent quand elles entrent dans les bergeries, ou quand elles en sortent ; quelle que soit la largeur de la porte, elles se précipitent en masse, se pressent, se foulent le ventre, si le berger n’a pas l’attention de se mettre en avant de la porte, et d’écarter les animaux pour s’opposer à leur empressement.

Les bergers disent qu’une brebis a coulé, quand elle a avorté lorsque la gestation n’étoit pas très-avancée.

Des indigestions font avorter les truies qui sont nourries de plantes qui fournissent un dégagement de beaucoup d’air ; tels sont le trèfle, sur-tout humide, les herbes potagères, les coquelicots, les solanum, la nielle. Les démangeaisons fréquentes dans ces animaux, et qui les portent à se frotter contre des corps durs, sont encore pour elles une cause de l’avortement. L’avortement est cependant rare dans les truies, à cause de l’état de liberté dans lequel elles vivent le plus généralement.

Les vaches, qui ont une fois avorté, sont plus sujettes à avorter de nouveau ; l’on en trouve la cause dans la longue gêne que la matrice a éprouvée, et qui lui a causé lentement, mais avec le temps, des altérations qui ne peuvent se dissiper ; tels sont l’épaississement, l’induration, le racornissement de la membrane, la suppuration des éminences qui donnent attache aux cotylédons. (Voy, Cotylédons, au mot Délivre.) Au nombre des causes de récidive de l’avortement, on doit mettre d’abord la continuation de celles qui l’ont déterminé la première fois.

Une grande partie des vaches qui ont avorté deviennent fréquemment en chaleur, et se font couvrir sans fruits d’autres sont attaquées de fureurs uté-