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Si, quelques jours après cette opération, on s’aperçoit que quelques parties des plantes jaunissent ou noircissent, il faut sans retardement les supprimer, et ne laisser subsister que celles qui sont parfaitement saines. La maladie occasionnée par l’eau de mer est une sorte de gangrène qui se propage avec rapidité, de proche en proche, et qu’on ne peut arrêter que par la suppression jusqu’au vif des parties qui en sont affectées.

Cependant, lorsque l’eau ne contient qu’une petite quantité de sel marin, elle peut être employée avec succès à quelques genres de cultures. Des expériences paroissent démontrer que, dans ce cas, elle est propre aux prairies, qu’elle accélère la végétation des plantes dont elles sont composées, que le fourrage qu’elles produisent est de meilleure qualité, et que les animaux qui en vivent ont la chair plus délicate et plus savoureuse. La réputation bien méritée qu’a la viande de moutons nourris sur des prairies salées, et celle dont jouit le beurre de Bretagne, produit par des vaches qui paissent dans des marais salans, confirment cette expérience. On n’est pas d’accord sur la quantité de sel que doit contenir l’eau pour être fructueuse à l’arrosement des prairies ; les uns pensent que dix livres de sel par muid sont suffisantes, d’autres croient qu’on peut porter cette quantité jusqu’à vingt-quatre livres.

On n’est pas plus d’accord sur la nature de la terre à laquelle ces arrosemens doivent être particulièrement affectés : ils doivent cependant agir fort différemment suivant la qualité du terrain, et cette donnée nous manque ; heureusement elle n’est pas essentielle aux progrès de l’agriculture.

Propriétés des eaux minérales. Sous cette dénomination sont comprises toutes les eaux qui, traversant des mines de différens métaux, s’imprègnent de leurs parties métalliques oxidées, et les charrient avec elles. Toutes ces eaux sont nuisibles à la végétation, mais il en est de moins dangereuses les unes que les autres.

Les eaux ferrugineuses ne sont malfaisantes, qu’autant qu’elles sont surchargées d’oxide de fer ; et lorsqu’elles n’en contiennent qu’une petite quantité, loin d’être nuisibles, elles favorisent la végétation.

Mais les eaux qui contiennent les oxides des autres métaux, et particulièrement de plomb et de cuivre, sont dangereuses pour presque tous les végétaux, et elles occasionnent leur mort en très-peu de temps.

Propriétés des eaux bourbeuses. Quant aux eaux qui tiennent en suspension des parties terreuses ou animales, des limons et des sucs de fumiers, qui sont grasses ou savonneuses, celles-ci sont très-favorables à la végétation, mais il convient de les administrer avec intelligence. Ces eaux bourbeuses, répandues sur les tiges et les feuilles des végétaux, bouchent leurs pores absorbans et sécrétoires, les empêchent de pomper dans l’atmosphère les gaz et les fluides qui leur sont nécessaires, en même temps qu’elles les privent de se débarrasser des sucs surabondans que ces végétaux renferment, dont la manne, le mastic, l’adragante donnent des exemples.

Les feuilles des plantes couvertes par des sédimens de cette nature, sont bientôt affectées d’une maladie que les agriculteurs ont nommée la rouille ; elle se distingue par les taches de couleur d’ocre, qui sont dispersées sur les feuilles et sur les tiges des plantes annuelles. Son effet est de faire périr et de faire tomber ces mêmes feuilles, et de priver par ce moyen les plantes d’un organe, qui est très-utile à leur existence.

Le remède à cette maladie, qui n’affecte guères que des prairies qui se trou-