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soluble dans l’eau, car une partie d’eau froide n’en dissout qu’un soixantième de son poids, et l’eau bouillante un trentième. Lemery et Lefèvre ayant observé que le borate de soude rendoit le tartre plus soluble, indiquèrent ce moyen ; mais on ne tarda pas à s’apercevoir que le sel ainsi obtenu, n’étoit plus le même, et Lassone proposa l’acide boracique. Son procédé consiste à faire dissoudre dans quatre onces d’eau bouillante, quatre gros de crème de tartre et un gros d’acide boracique ; sa solubilité est tellement augmentée, qu’une partie peut se dissoudre dans cinq à six parties d’eau. La combustion de la crème de tartre et de lies de vin, en détruisant l’acide tartreux, laisse à nu la potasse qui fournit aux arts un alcali très-recherché et assez pur, que l’on connoît sous le nom de cendres gravelées. M. Pajot Descharmes indique, pour les préparer un procédé fort simple : sous la botte d’une cheminée, et à dix-huit pouces de l’âtre, on établit une grille sur le devant de laquelle on en place une autre verticalement ; c’est dans cette espèce de cage que l’on met les lies pressées, sèches ou vertes. On a allumé le feu, et l’on doit avoir le soin de remettre de nouvelles lies, en raison des cendres gravelées qui passent à travers la grille. Un quintal de bonne lie doit donner de soixante-dix à quatre-vingt livres d’alcali, dont la bonne qualité se reconnoît à ces caractères : il doit avoir un coup-d’œil verdâtre tirant sur le bleu, être spongieux, léger, et ne laisser appercevoir, dans sa cassure, aucune trace de vitrification. Il résulte des observations très-importantes de Thénard, sur les combinaisons de l’acide tartreux avec différentes bases, que tous les tartrates s’unissent entr’eux, et forment des sels triples dont il a déterminé les proportions et fait connoître les propriétés.

Il a analysé avec beaucoup de soin le tartre antimoiné de potasse qui, à cause de son fréquent usage, offroit le plus grand intérêt.

Tartrite acidule
de potasse, antimoiné.
Émétique.
Composé de Tartrite de potasse 34 Eau 8
Tartrite d’antim. 54 Oxide ant. 38
Eau 8 Acide tartr. 34
Potasse 16

Les résultats de ses recherches lui ont fait connoître que, dans la composition de l’émétique, la présence du tartrite acidule de potasse, du tartrite de potasse, du tartrite de chaux, et d’une quantité variable d’eau, en modifiant son action, devoit apporter une différence extrême dans ses effets. Les moyens qu’il propose, pour remédier à ces graves inconvéniens, sont :

1°. Mettre un excès d’oxide d’antimoine à la saturation de la crème de tartre.

2°. Ne point se servir d’eaux mères, sur-tout de celles de la première cristallisation.

3°. Faire cristalliser au moins deux fois l’émétique, pour qu’il n’y ait plus de tartrite de chaux.

4°. Bien fermer les vases qui contiennent cette substance. On détruit les effets dangereux de ce sel pris à trop forte dose, en donnant au malade des décoctions extractives, et sur-tout celle de quinquina qui formr, avec le tartrite de potasse antimoiné, un sel qui n’est plus émétique. Parmi les combinaisons variées de la crème de tartre avec le fer, on compte le tartre chalybé, la teinture de Mars, le tartre martial soluble, les boules de Nancy, qui sont toutes plus ou moins en usage en médecine.

Quoique nous ne trouvions que bien rarement l’acide tartreux libre, nous savons cependant qu’il existe, mais en petite quantité, dans le tamarin et dans quelques autres végétaux. Le moyen indiqué par Schèele pour l’avoir pur, consiste à former un tartrite de chaux qu’on décompose ensuite par l’acide sulfurique. Il cristallise très-facilement ;