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à six fois par mois, tandis que, par le premier procédé, le sirop se conserve fort long-temps et n’a pas moins de qualité. Ce sirop peut également être employé par les nonnes ménagères, à la confection des confitures de cerises, de prunes, d’abricots et de coings. La proportion est d’une livre de sirop, ou seulement trois quarterons, pour une livre de fruits. Ces confitures doivent, pour se conserver, être beaucoup plus cuites que celles au sucre. On ne peut employer le miel pour les gelées de fruits : celle de groseille perdroit son acidité. On doit priver le plus possible d’humidité, en les séchant, les fruits, écorces ou racines, dont on voudroit faire des confitures sèches au miel. Les proportions pour les ratafias de fleurs d’orange, de noyaux, sont d’une livre de miel par pinte d’eau-de-vie ; les procédés sont les mêmes qu’en employant le sucre. (Cotte.)


ABLE, ABLET ou ABLETTE, et quelquefois OVELLE, (Cyprinus al burnus, Liivn.) petit poisson que Linnæus a placé dans le genre des carpes, et dans l’ordre des poissons abdominaux, c’est-à-dire, qui ont les ouïes soutenues par quelques rayons osseux, et les nageoires ventrales en arrière de la poitrine, sur l’abdomen.

Sa longueur ordinaire est de quatre à cinq pouces ; il est un peu aplati et plus allongé que le goujon ; il n’a point de fiel. On le distingue des autres espèces du même genre par son museau pointu, sa mâchoire inférieure plus avancée que la supérieure, sa bouche armée de sept dents, cinq devant et deux derrière, ses yeux grands et le nombre des rayons qui composent ses nageoires : l’on en compte dix à la nageoire du dos, qui est plus rapprochée des nageoires ventrales, que de la tête, quatorze aux nageoires de la poitrine, neuf à celles du ventre, vingt-une à l’anale[1], et dix-huit à celle de la queue. De petites écailles minces, brillantes, et peu adhérentes à la peau, revêtent tout le corps. La ligne latérale forme une courbure, et paroît argentée.

Les autres couleurs de l’able consistent en une teinte olivâtre sur la tête et le dos, en petits points noirs semés sur le front, en bleu aux joues et à la prunelle, en un éclat argentin dans l’iris des yeux et sur le corps, en blanc rougeâtre sur les nageoires de la poitrine, en gris sur l’anale, enfin, en verdâtre à la nageoire de la queue.

Quand la teinte olivâtre du dos s’étend un peu sur les côtés, l’able se nomme able bordée. Quelques uns en font une espèce distincte ; mais ce n’est qu’une simple variété qui tient vraisemblablement à l’âge ou au sexe et peut-être à l’habitation.

Presque tous nos lacs et toutes nos rivières nourrissent des ables. Elles frayent dans les mois de mai et de juin, et elles sont d’une grande fécondité. Quoique d’assez bon goût, leur chair mollasse et trop remplie d’arêtes n’est point estimée, à moins qu’elles ne soient un peu grosses, et prises en automne, époque où elles sont chargées de graisse. La meilleure manière de les apprêter est de les faire frire.

Mais, si l’able n’est point recherchée pour figurer sur les tables délicates, sa pêche ne laisse pas d’être lucrative, parce qu’elle fournit la matière avec laquelle les émailleurs fabriquent les fausses

  1. Je nommerai ainsi la nageoire placée près de l’anus des poissons. Presque tous les naturalistes la désignent sous la dénomination de nageoire de L’anus ; mais, comme cet ouvrage est destiné à un plus grand nombre de lecteurs que ceux qui ne traitent que de l’histoire naturelle proprement dite, je me servirai de l’expression, à la vérité moins anatomique, mais en même temps moins grossière, de nageoire anale ; je l’ai déjà employée dans l’Histoire naturelle des Poissons faisant suite à mon édition de Buffon.