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sèche de l’hiver, sont avides de plantes fraîches. Mon dessein n’est point de préconiser cette production plus qu’elle ne le mérite ; je me bornerai à rapporter quelques observations que j’ai faites très-récemment, et dont je puis garantir l’authenticité. J’ai mis, au mois d’avril de cette même année, trois chevaux à la nourriture de la chicorée verte ; l’un d’eux avoit des démangeaisons sur tout le corps ; l’autre avoit des eaux à une jambe : ils se sont parfaitement rétablis, sans autres traitemens : ils sont même engraissés, sont devenus très clairs, et leur poil très-lisse. J’observerai que le premier et deuxième jours, ils mangèrent peu ; mais ensuite, et tout le temps qui a suivi, ils ont mangé cette herbe avec avidité, et ont été ainsi nourris à l’écurie pendant un mois entier.

» Les vaches auxquelles on donne à l’étable une ou deux rations de chicorée par jour, abondent en lait, et quoique cette plante soit amère, elles la mangent avec appétit, donnent un lait aussi doux et aussi crémeux que lorsqu’elles sont nourries avec tout autre fourrage.

» Donnée aux moutons, elle a l’avantage de les bien nourrir, et de les préserver de la maladie rouge, qui enlève quelquefois la moitié des troupeaux.

» Le sol sur lequel j’ai semé la grande chicorée, est une terre savonneuse et d’une qualité médiocre. Le produit pourra peut-être paroître exagéré ; aussi, je n’exige pas qu’on en croie un simple récit ; mais, ce que j’avance à cet égard, peut être constaté par ce qui est encore existant dans la portion de terrain qui n’a point été coupée. Cette plante a dans le moment actuel, (le 20 juin) sept, et même huit pieds de haut : elle est extrêmement touffue et chargée de feuilles. Le produit d’une seule coupe, sur l’étendue d’un arpent, peut être évalué à plus de cinquante-cinq milliers pesant, par l’appréciation et le calcul juste que j’en ai fait. En comparant ce produit à la plus riche et la plus abondante prairie naturelle ou artificielle, on verra qu’il n’en est aucune d’aussi féconde. La portion qui a été la première coupée au mois d’avril dernier, pourra l’être encore présentement, ce qui produira au moins quatre coupes dans l’année.

» J’en ai recueilli l’année dernière, que j’ai fait sécher, et que les moutons ont très-bien mangée pendant l’hiver ; mais la dessiccation en est difficile.

» Cette plante, qui croît si facilement, dont le produit est si abondant, et qui a des propriétés si précieuses, est bien faite pour déterminer à sa culture ceux qui en voient les avantages ; et peu de cultivateurs se refuseront, sans doute, à en ensemencer une portion de leur terrain, qu’ils abandonneront au printemps à leurs bestiaux, ou qu’ils feront couper pour leur être donnée en verd à l’étable. Cette dernière méthode sera toujours la plus profitable ».

La culture de la chicorée, pour la nourriture des bestiaux, est assez générale en Allemagne et en Prusse. On la sème en avril ou au commen-