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chines sont presque inconnues. La France ainsi que les autres pays du midi de l’Europe offre un exemple bien plus frappant de ce genre d’insouciance.

Les hommes éclairés parmi ces nations florissantes ne s’étoient pas encore occupés à chercher des moyens mécaniques pour battre le blé, tandis que les paysans grossiers des régions glacées du Nord employoient avec succès de semblables moyens. Ces faits prouvent que les hommes, en général, ne deviennent créateurs et ne perfectionnent que lorsqu’ils y sont contraints par la dure nécessité.

Quelques personnes cependant ont imaginé dans ces derniers tems des méthodes pour accélérer le battage des grains ; mais comme les inventeurs avoient peu de génie, ou qu’ils ne connoissoient pas suffisamment l’opération qu’ils vouloient faciliter, leurs inventions n’ont été d’aucune utilité à l’agriculture. Les Écossois qui depuis plusieurs années dirigent leurs recherches vers ce but, ont imaginé une machine qui s’est successivement perfectionnée, qui a été adoptée en Angleterre, et qui, de ce pays, a passé en Suède, où elle a reçu quelques modifications avantageuses.

Cette machine que nous avons vue chez plusieurs cultivateurs, et qui se propage de jour en jour en Suède, mérite d’être employée dans nos campagnes. Nous avons pensé, d’après l’examen de ses effets, qu’elle rendroit de grands services à notre agriculture, sur-tout à une époque ou la population de la France se trouve affoiblie par les suites inévitables de notre révolution. L’industrie et le commerce qui prendront à la paix de grands accroissemens, réclament l’emploi de tous les moyens mécaniques par lesquels on peut suppléer au manque de bras.

Personne n’ignore que le commerce immense et les richesses prodigieuses des Anglois sont dues à l’emploi des moyens mécaniques et à l’application que ce peuple en a fait aux arts et aux manufactures. Les gouvernemens de l’Europe doivent porter un œil attentif sur la Grande-Bretagne, s’ils veulent enfin cesser d’être ses tributaires.

Quelques personnes réclament contre l’usage des machines dont le travail remplace celui de plusieurs hommes. Ce n’est pas ici le lieu de réfuter de semblables objections. Il nous suffit de citer l’exemple de l’Angleterre et de la Hollande, pays qui doivent leur prospérité et leur population à l’usage multiplié de ces machines. D’ailleurs, tout moyen qui procure des avantages à l’agriculteur en diminuant le prix d’une denrée, est toujours profitable aux différentes classes de la société.

Il y a dans la Brie, dans la Beauce, etc., un grand nombre de fermiers qui dépensent annuellement, pour le battage de leur grain, 2 ou 3 mille francs. Ils sont obligés d’entretenir, d’une récolte à l’autre, plusieurs ouvriers uniquement occupés a ce travail. Ces cultivateurs en faisant construire la machine que nous proposons, di-