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regardant le levant ou le midi, et en terre vigoureuse, plus légère que pesante, est le lieu qu’on se choisira pour garenne. La terre ne sera pas toutefois beaucoup sabloneuse ; d’autant qu’en telle les conils (de cuniculus lapin) ne se peuvent creuser les tannières à plaisir, la terre s’éboulant à cause de sa légèreté, sans avoir tenue : mais elle doit être fermée, et, pour ce faire, participer quelque peu de l’argile, non toutefois beaucoup, pour ne rendre le creuser trop difficile. Ce sera grand avancement d’œuvre, si le lieu est déjà planté d’arbrisseaux et buissons à ce propres. Mais si par le défaut de nature ou négligence des prédécesseurs il se trouve vuide, il sera fourny d’arbres de la sorte, et plantez en la manière cy-après enseignée, afin qu’en estant formés des taillis forts et épais, les conils y puissent avoir seure retraite, et des vivres en abondance pour s’y entretenir. Il est à souhaiter que la garenne soit près de la maison, tant pour le plaisir de la pouvoir souvent et aisément visiter, et y prendre la fraîcheur de l’ombrage, que pour la conservation des conils, qu’on dérobe facilement étans en lieu trop écarté. »

» Afin que les conils ne s’enfuyent, il sera nécessaire de fermer la garenne avec de bonnes murailles bien maçonnées à chaux et sable, hautes de neuf à dix pieds, et profondément fondées dans terre, pour oster au conils l’espérance d’en sortir par-dessous les fondemens, comme à cela ils s’efforcent, minant dans terre ; tant ils désirent la liberté, se sentant enfermez, jusqu’à ce que ils ayent accoutumé le lieu. Les hayes ne servent de rien pour retenir les conils à travers desquelles ils passent facilement, quelques fortes et épaisses qu’elles soient, ny aussi les fossés plus larges et profondes qu’on les fasse, hormis qu’ils fussent remplis d’eau : dont la cloison se rend préférable à toute autre, pour les raisons dites cy-après. Au défaut de cette commodité, il se faudra résoudre à la muraille, sans faire autre estât ny des hayes, ni des fossez que pour préserver le bois taillis du dégast des bêtes, sans espérer de pouvoir retenir les conils. Mais si, pour l’incommodité du païs, rare en pierre, vous ne pouuez maçonner de bonnes murailles comme vers Tholoze et en plusieurs autres endroits, où le bâtiment est très-cher, à ce défaut la garenne sera close ou de murailles de terre, selon leur plus commun usage, ou de fossez et hayes tout ensemble : dont à tout le moins le taillis demeurant en sûreté. Et quant aux conils, par coutume, à la longue, s’y arrêteront pour les bons logis que nous leur dresserons ès terriers à la manière cy-après enseignée. »

» Il a déjà été parlé de la capacité de la garenne. Doncques, sans crainte d’excéder, nous la prendrons aussi grande que le lieu le permettra, afin d’avoir des conils sains et délicats au manger, comme tels sont toujours ceux qu’on nourrit en terre spacieuse, lesquels courans à volonté ne se