Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/478

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

champignons, les cerises et beaucoup d’autres substances végétales également muqueuses : en observant toujours de les faire blanchir dans l’eau bouillante pour, d’une part, combiner leurs principes et les mettre en état de conserver leur forme, et de l’autre, pour mieux prendre le vinaigre. C’est ainsi qu’on parvient à confire ensemble tous les fruits charnus avant l’époque de leur parfaite maturité, et à les présenter sur nos tables, sous le nom de macédoine.

On ne peut se dispenser de convenir que les mets aigrelets, loin de les regarder comme des alimens de luxe, ne soient très-salutaires dans certaines circonstances, et que leur usage ne prévienne les maladies inflammatoires ou scorbutiques : pourquoi les fermiers dédaigneroient-ils de former des provisions de ce genre et d’en distribuer de tems en tems à leurs ouvrier pour assaisonner agréablement leurs mets ? c’est dans cette vue que nous allons rapporter la manière de confire les betteraves qui, dans cet état sont fort du goût des Allemands, servies sur leurs tables en même-tems que le potage.


Betteraves confites au vinaigre.

On expose les betteraves au four, dès que le pain en est ôté ; on les coupe par tranches minces ; on les met dans un pot, et on verse assez de vinaigre pour les recouvrir, ayant la précaution d’y ajouter un peu de sel ; mais comme on remarque que les betteraves confites ainsi ne se conservent pas long-tems, et que le vinaigre en quinze on vingt jours, a pu cesser d’être acide et a, par conséquent, perdu toute sa force, on a grand soin de n’en confire que peu à-la fois ; ou bien lorsque cet inconvénient a lieu, on renouvelle le vinaigre, parce qu’alors il n’agit plus sur le tissu de la racine déjà assez imprégnée et combinée avec l’acide. Cette précaution devient même indispensable si on veut conserver, un certain tems, en bon état les fruits confits au vinaigre.

Nous ferons ici cette question : Pourquoi les fruits et les légumes qu’on met confire dans du vinaigre absorbent-ils la partie la plus acide de ce fluide, comme ils absorbent l’alkool, quand c’est l’eau-de-vie qui leur sert de véhicule, et donnent-ils en échange de cette acquisition, l’eau qui les constitue ?

Pour rendre raison de ce phénomène, il suffit de connoître la propriété qu’a l’acide acétique et généralement tous les acides de se porter sur la gélatine, de se combiner avec elle, et souvent même de lui faire prendre la forme concrète. Or, comme tous les fruits qu’on met confire dans le vinaigre contiennent une certaine quantité de gélatine, il ne doit plus paraître surprenant de voir l’acide acétique quitter l’eau avec laquelle il se trouve mêlé dans le vinaigre, pour venir se réunir avec cette gélatine.

Une chose essentielle à remarquer, c’est que dans cette espèce de combinaison, l’acide se trouve toujours en excès, à-peu-près comme dans certains sels que nous