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presque impossible à reconnoître, plus tolérable, sans doute, puisqu’elle a l’acide propre du vin pour base : elle consiste à faire bouillir dans un vaisseau de terre, du tartre, avec l’acide sulfurique. Cet acide s’unit avec l’alkali, et en sépare l’acide. On obtient par ce moyen une liqueur très-acide, contenant l’acide du tartre à nu, dont quelques gouttes suffisent pour bonifier une certaine quantité de mauvais vinaigre. C’est avec cette liqueur mêlée à l’eau, que l’on fortifie le verjus, le jus de citron, etc.

Il y a une foule d’autres sophistications employées pour procurer au vinaigre une saveur âcre et brûlante, que l’on confond souvent avec la saveur fraîche, acide, forte et pénétrante que doit avoir cet acide, quand il a les qualités requises ; mais il convient peut-être de n’en point parler, dans la crainte de les apprendre à quiconque les ignoreroit, d’autant mieux qu’il n’est pas facile d’offrir des pierres de touche pour déceler les fraudes, sans des examens auxquels chacun ne peut se livrer ; on reconnoît plus aisément la pureté du vinaigre, en l’exposant simplement à l’air libre. S’il s’y amasse beaucoup de moucherons, connus sous le nom de mouches à vinaigre, c’est une preuve que le vinaigre est pur, et la quantité de ces moucherons décèle sa force.

Mais, comme nous l’avons déjà dit, le vinaigre, sur-tout celui provenant des vins foibles, ne peut se conserver long-temps en bon état : il s’altère, sa transparence se trouble, et bientôt il se recouvre d’une pellicule épaisse, visqueuse, qui détruit insensiblement sa force, au point qu’on est obligé de le jetter.

Cette espèce de couenne formée à la surface du vinaigre qui s’altère, ne se fait remarquer principalement que dans ceux qui ont été faits avec le suc du raisin, ou dans lesquels on a déterminé la fermentation au moyen des lies de vin ou du tartre ; il paroît vraisemblable, d’après cette observation, que c’est ce dernier sel qui contribue à sa formation. Voici un expérience qui semble le prouver.

En mettant en digestion, dans une certaine quantité d’eau, à une douce chaleur, du tartre en poudre, on voit quelquefois se former à la surface du liquide surnageant, une couenne ou pellicule semblable à celle qui recouvre le vinaigre qui s’altère ; mais on remarque en même-temps, qu’à mesure que la pellicule se forme, le tartre se décompose de manière qu’il est possible d’opérer complètement sa décomposition, en favorisant la production de cette pellicule et l’enlevant à mesure qu’elle a acquis une sorte d’épaisseur : en général, on remarque que les vinaigres à la surface desquels ces pellicules sont voisines de leur formation, deviennent, en effet troubles, foibles, et ne peuvent plus, servir aux usage s ordinaires.


Application du vinaigre à la conservation des viandes.

On sait que toutes les substances animales ont une grande tendance