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Des signes auxquels on reconnoit que le vinaigre est bon, falsifié ou gâté.

Le meilleur vinaigre doit être d’une saveur acide, mais supportable, d’une transparence égale à celle du vin, moins coloré que lui, conservant, au reste, une sorte de parfum, un montant, un spiritueux, en un mot, un gratter qui affecte agréablement les organes. C’est surtout en le frottant dans les mains que ce parfum se développe.

La cupidité de certains fabricans de vinaigre, les porte souvent à employer des vins foibles, ou qu’ils savent extraire des lies. Le procédé par lequel ils obtiennent ces derniers, dissipe les parties essentielles à la confection du bon vinaigre. Ces lies épaisses et visqueuses sont versées dans un chaudron placé sur le feu ; la chaleur détruit leur viscosité ; alors elles sont enfermées dans un sac, et à l’aide d’une presse, on en exprime facilement tout le liquide : Cette espèce de vin est versée sur un rapé de copeaux, pour l’éclaircir. Il est aisé de voir que l’action de la chaleur ayant dissipé le peu d’esprit que ce vin contenoit, il ne peut fournir qu’un vinaigre médiocre et très-foible.

Le fabricant qui emploie ces moyens, sait très-bien que le vinaigre qu’il prépare est inférieur en qualité ; mais aussi, il sait en relever la saveur par le moyen des substances âcres, telles que la pyrèthre, le galanga, et sur-tout le piment, ou poivre d’inde, capsicum annuum. L’acheteur qui goûte ce vinaigre, se sent la bouche en feu, et attribue à l’acidité ce qui n’est que l’irritation violente que ces substances excitent sur l’organe du goût. Aussi, lorsqu’on n’est pas parfaitement connoisseur, il ne faut jamais s’attacher à la saveur quand on achette du vinaigre ; parce que les indications qu’elle fournit sont souvent illusoires. La saturation d’une certaine quantité de vinaigre par la potasse, est le moyen le plus sûr que l’on puisse employer pour comparer la qualité des vinaigres. Une once, ou 30 grammes 572 milligrammes de cette liqueur, exige ordinairement 60 grains ou 9 grammes 184 milligrammes de cet alkali, tandis que la même quantité de ces vinaigres sophistiqués, qui, par leur saveur brûlante, paroissent si fort, est saturée avec 24 grains ou 1 gramme 272 milligrammes de ce sel.

Lorsque, pour augmenter l’acidité de leur vinaigre, les ouvriers auront employé l’acide sulfurique, il sera facile de démasquer cette faute, en goûtant le vinaigre : il agacera les dents, et exhalera, en le brûlant sur du charbon de terre, l’odeur de l’acide sulfureux. Si on le sature avec la potasse, on en obtiendra, par la cristallisation, au lieu d’une acétite de potasse, un sulphate de potasse.

On falsifie aussi le vinaigre avec l’acide muriatique, (esprit de sel). Cette falsification est assez difficile à reconnoître au goût. On peut s’en assurer par la dissolution d’argent, que l’acide muriatique précipite en blanc ; mais il est une falsification