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très-grand. Alors la masse d’air qui y étoit renfermée a pu contenir suffisamment d’oxigène pour acidifier le vin employé. Car, sans absorption d’air, il ne peut y avoir d’acidification du vin. C’est une vérité qui a été mise dans le plus grand jour par l’expérience de Rozier. Voyez Fermentation acéteuse.

Nous pensons qu’il en est de même de l’expérience de Homherg qui assure avoir fait du bon vinaigre en brassant pendant trois jours une bouteille de vin qu’il avoit attachée pour cela au cliquet d’un moulin ; il est également présumable que la majeure partie de la bouteille étoit vuide : alors l’agitation violente, en mêlant les molécules de la liqueur avec celles de l’air, en aura multiplié les contacts. Les parties constituantes du vin et celles du gaz oxigène rapprochées ainsi du centre de leur affinité respective, auront cédé à la tendance qui les porte les uns vers les autres ; elles se seront combinées et le vin aura été changé en vinaigre.

Ce n’est sûrement pas d’après la connoissance de ce qui se passe dans la fermentation acéteuse que se sont établies les opérations de l’art du vinaigrier. Cet art qui sans doute est très ancien puisqu’il est fondé sur les besoins de l’homme, comprend une sorte de procédés que l’on a toujours exécutés, plutôt par l’imitation que d’après les principes d’une pratique éclairée par la théorie. Cependant il est aisé de sentir combien les lumières que fournit la chimie sont essentielles pour les progrès de cet art et pour l’explication des différences que présente le vinaigre, suivant la nature de la liqueur vineuse dont il tire son origine.

C’est cette science, en effet, qui nous apprend pourquoi les cidres qui contiennent toujours des parties muqueuses non encore atténuées, et peu de parties spiritueuses, donnent un vinaigre plus foible que celui qui est fait avec le vin. Pourquoi, parmi les différens vins, ceux qui abondent en parties colorantes extractives et qui sont foibles, sont bien moins propres à produire un bon vinaigre que ceux qui sont foibles en couleur et très spiritueux.

Différentes expériences exactes ont prouvé positivement que l’alkool ou esprit de vin contribuoit essentiellement à la formation et à la force du vinaigre ; elles ont démontré que les principes de ce produit de la fermentation vineuse avoient une singulière aptitude à se combiner, puisque dans tous les procédés oxigénans auxquels on les a soumis, il y a toujours eu génération d’acide acétique. C’est à raison de cette disposition de la partie spiritueuse du vin que Cartheuser assure qu’on peut augmenter de beaucoup la force du vinaigre en introduisant dans le vin une certaine quantité d’eau-de-vie, avant de lui faire subir la fermentation acide. Becher avoit aussi reconnu la nécessité de la partie spiritueuse du vin pour la formation du bon vinaigre. Il affirme, dans sa physique souter-