Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/428

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

points de la liqueur ; il se forme une écume à la surface qui déverse par le bondon, et on a l’attention de tenir le tonneau toujours plein pour que l’écume sorte et que le vin se dégorge. Il suffit dans les premiers instans d’assujettir une feuille sur le bondon, ou d’y mettre une tuile.

À mesure que la fermentation diminue, la masse du liquide s’affaisse ; et on surveille cet affaissement avec soin pour verser du nouveau vin et tenir le tonneau toujours plein ; c’est cette opération qu’on appelle ouiller. Il est des pays où l’on ouille tous les jours, pendant le premier mois ; tous les quatre jours, pendant le deuxième ; et tous les huit jusqu’au soutirage. C’est ainsi qu’on le pratique pour les vins délicieux de l’Hermitage.

En Champagne, on laisse fermenter les vins gris dans les tonneaux, dix à douze jours ; et, dès qu’ils ont cessé de bouillir, on ferme les tonneaux par le bondon, en y laissant un soupirail à côté qu’on appelle broqueleur. On le ferme huit ou dix jours après, avec une cheville de bois qu’on peut ôter à volonté ; dès qu’on les a bondonnés, on doit ouiller, tous les huit jours, par le soupirail, pendant vingt-cinq jours ; après cela, de quinze en quinze jours pendant un ou deux mois ; ensuite tous les deux mois, aussi long-tems que le vin reste dans la cave. Lorsque les vins n’ont pas assez de corps, et sont trop verds, ce qui arrive dans les années humides et froides ; ou lorsqu’ils ont trop de liqueur, ce qui arrive dans les années trop chaudes et sèches, 25 jours après qu’ils ont été faits, on roule les tonneaux cinq ou six tours pour bien mêler la lie ; on répète cette manœuvre tous les huit jours pendant un mois ; le vin s’améliore par ce moyen.

La fermentation des vins de Champagne qu’on destine à être mousseux est très-longue ; on croit qu’il peut mousser constamment, pourvu qu’on le mette eu bouteilles, depuis la vendange jusqu’en mai (prairial), et que, plus on est près de la vendange, mieux il mousse. On assure encore qu’il mousse toujours si on le met en bouteilles depuis le dix jusqu’au quatorze mars. Le vin ne commence à mousser qu’un mois et demi après qu’il a été mis en bouteilles. Le vin de la montagne mousse mieux que celui de la rivière ; lorsqu’on met le vin en flacons, en juin et juillet, (messidor et thermidor), il mousse peu ; et pas du tout si c’est en octobre et novembre, (brumaire et frimaire), après la récolte.

En Bourgogne, dès que la fermentation s’est ralentie dans le tonneau, on le bouche et on perce un petit trou, près du bondon, qu’on ferme avec une cheville de bois qu’on appelle faucet. On le débouche de tems en tems pour laisser évaporer le reste du gaz.

Dans les environs de Bordeaux, on commence à ouiller, huit à dix jours après avoir déposé les vins dans les tonneaux. Un mois après on les bonde et on ouille tous les huit jours ; dans le principe, on