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C’est un principe incontestable que l’activité de la fermentation est proportionnée à la masse : mais il ne faut pas en conclure qu’il soit constamment avantageux de faire fermenter en grand volume, ni que le vin provenant de la fermentation établie dans de plus grandes cuves ait des qualités supérieures ; il est un terme à tout, et des extrêmes également dangereux, qu’il faut éviter. Pour avoir une fermentation complète, il faut craindre de l’obtenir trop précipitée. Il est impossible de déterminer quel est le volume le plus favorable à la fermentation : il paroît même qu’il doit varier selon la nature du vin et le but qu’on se propose. S’il est question de conserver l’arôme, elle doit s’opérer en plus petite masse que s’il s’agit de développer toute la partie spiritueuse, pour fabriquer des vins propres à la distillation. J’ai vu monter le thermomètre à 27 degrés dans une cuve qui contenoit trente muids de vendange (mesure du Languedoc). À la vérité, dans ce cas, tout le principe sucré est décomposé ; mais il y a déperdition d’une portion d’alkool par la chaleur et le mouvement rapide que produit la fermentation.

En général, on doit encore varier la capacité des cuves selon la nature du raisin : lorsqu’il est très-mûr, doux, sucré, et presque desséché, le moût est épais, pâteux, etc. la fermentation s’y établit difficilement ; et il faut une grande masse de liquide pour décomposer pleinement le suc sirupeux : sans cela, le vin reste liquoreux, douceâtre, et nauséabond ; ce n’est qu’après un long séjour dans le tonneau que cette liqueur arrive au degré de perfection qu’elle peut atteindre.

La température de l’air, l’état de l’atmosphère, le temps qui a régné pendant la vendange, toutes ces causes et leurs effets doivent toujours être présens à l’esprit de l’agriculteur, pour qu’il en déduise des règles de conduite capables de les guider.


IV°. Influence des principes constituons du moût sur la fermentation.

Le principe doux et sucré, l’eau et le tartre, sont les trois élémens du raisin qui paroissent influer le plus puissamment sur la fermentation ; c’est non seulement à leur existence qu’est due la première cause de cette sublime opération, mais c’est encore aux proportions très-variables entre ces divers principes constituans qu’il faut rapporter les principales différences que nous présente la fermentation.

1°. Il paroît prouvé, par la nature comparée de toutes les substances qui subissent la fermentation spiritueuse, qu’il n’y a que celles qui contiennent un principe doux et sucré qui en soient susceptibles ; et il est hors de doute que c’est sur-tout aux dépens de ce principe que se forme l’alkool.

Par une conséquence qui découle naturellement de cette vérité fondamentale, les corps, dans lesquels le principe sucré est le plus abondant, doivent fournir la