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raisins. Ce n’étoit pas la peine de faire des livres pour remplir une pareille tâche ; car la vigne est tellement vivace de sa nature, que, secondée par la nature la plus ordinaire, les accidens à part, elle donne les récoltes les plus abondantes. Ne voulez-vous que du raisin en quantité ? plantez en bonne terre, fumez souvent, labourez trois ou quatre fois l’année, taillez long ; et vous ne saurez où loger votre récolte. J’ai suivi une marche différente ; je me suis encore plus occupé de la qualité des fruits que de leur abondance, dans l’espoir de me conformer davantage au goût des cultivateurs qui lisent. Quelques-uns regretteront peut-être de ne pas trouver ici tous les procédés, toutes les méthodes applicables à la culture de la vigne, dans toutes les circonstances, dans tous les terreins, à toutes les expositions. Mais les modifications dont cette culture est susceptible, sont tellement multipliées qu’il nous eût semblé absurde d’entreprendre de les désigner. Au reste, elles dérivent toutes des principes généraux ; et nous avons tâché de les établir clairement.

Je n’ai parlé ni des tranchées à faire dans les vignobles pour faciliter l’écoulement des eaux, ni des maladies auxquelles la vigne est exposée dans les terreins humides, parce que je n’ai pas dû présumer qu’on fit choix d’un sol de cette nature pour ce genre de culture.


Section VI.

De la vigne en treille, de la récolte et de la conservation des raisins[1].

Cette manière de disposer les ceps de la vigne, en les adossant à un mur, présente de grands avantages pour les pays sur-tout où la vigne en grande culture ne peut parvenir ou ne parvient que difficilement à sa maturité. Comme la vigne est douée d’une force de végétation qui la rend susceptible de croître dans toutes sortes de terres ; comme en la dirigeant contre un mur on lui procure la réverbération des rayons du soleil, qui double l’intensité de la chaleur atmosphérique, il n’existe peut-être pas une propriété rurale même dans les contrées les plus septentrionales de la France, où l’on ne puisse se procurer des raisins très-bons à manger. Mais c’est toujours en vain, il ne faut pas se le dissimuler, qu’on à cherché à

  1. La vigne en tonelle ne mûrit que très-difficilement dans les climats de la France.-On réunit tous les jets pour les dresser au berceau ; mais ils forment un buisson qui ne permet pas aux rayons du soleil de frapper le raisin, de parvenir jusqu’à lui. Le raisin éprouve à peine l’action de l’air ; il est caché par les feuilles et elles sont placées d’une manière si confuse qu’elles se nuisent mutuellement. Cette manière de diriger la vigne n’est seulement admissible que dans les régions brûlantes, et où les terres sont excessivement sèches, parce que le berceau y sert à maintenir et à condenser autour de la plante le peu de vapeur et d’humidité qui s’exhale.