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En effet, dès que les racines de ces plantes ont acquis une certaine étendue, les vers de presque toutes les espèces, entre autres ceux du hanneton, abandonnent la vigne pour s’y jeter. Leur présence s’annonce par la mollesse des tiges qui se laissent aller, et par la flétrissure des feuilles. Un coup de bêche suffit pour arracher la plante, et entraîner avec elle, hors de terre, tous les insectes qui la dévoroient. Ceux ci, exposés à l’ardeur du soleil, ne tardent pas à succomber.

Si la nature a multiplié les insectes nuisibles aux plantes, elle a en même temps donné à ceux-ci des ennemis beaucoup plus redoutables que toutes les vengeances de l’homme. Toutes les larves, par exemple, ont un ennemi puissant dans un insecte du genre des coléoptères, le bupreste, buprestus. Il est un peu plus gros que le hanneton ; sa robe verte est ornée de raies longitudinales, ou de petits points de la couleur de l’or. Cet insecte ne touche ni aux racines, ni aux autres parties des végétaux ; mais il attaque vigoureusement toutes les espèces de vers : ceux de son espèce ne sont pas même à l’abri de sa voracité. Il ne faut pas s’en laisser imposer par son agilité, par sa parure brillante. Il ne faut les prendre qu’avec précaution, parce qu’ils contiennent une liqueur âcre, caustique, et brûlante, capable d’occasionner une cuisson et une douleur assez vive, si elle jaillissoit dans l’œil ou sur les lèvres. Cet insecte se nomme vulgairement jardinière, catherinette, etc.

Le cultivateur le plus soigneux est souvent obligé de remplacer des ceps qui périssent, ou par vétusté (car la durée de la vie n’est pas la même pour toutes les races de la vigne), ou par des accidens imprévus, ou par des causes qu’il n’a été en son pouvoir ni de prévenir, ni de détruire. Souvent encore il a intérêt à substituer à certains cépages, des espèces plus analogues à son climat, et à la nature de son terrain.

Dans le premier cas, si la vigne est jeune, des marcottes rempliront naturellement son objet : si la vigne éroit âgée, les marcottes viendroient difficilement à bien ; l’ombrage des anciennes souches les étoufferoit ; les vieilles racines gagneroient de vitesse celles de la nouvelle plante, pour s’emparer de la terre destinée aux dernières. Le provignage est le grand moyen que les cultivateurs ont imaginé pour regarnir les espaces vides, dans les vignes d’un certain âge. Il est connu dans la plupart de nos vignobles ; mais Rozier a relevé les fautes nombreuses que l’on, commet dans la pratique commune, et lui a substitué une meilleure méthode : nous eu ferons connoître, ci-après, les détails.

Dans le second cas, c’est-à-dire quand on veut seulement remplacer une espèce par une autre, on a recours à la greffe.

L’art de greffer la vigne est ancien, quoique plusieurs papiers publics nous l’aient annoncé comme une découverte nouvelle, il y a douze ou quinze ans. Il consiste à couper net le cep à cinq centi-