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quille, un petit couvercle blanchâtre assez solide, par lequel il se met à l’abri des injures de l’air et de la rigueur du froid. Il demeure ainsi tapi, sans mouvement, et sans prendre de nourriture, pendant cinq ou six mois, jusqu’à ce que le printemps ait ramené les beaux jours et la verdure. Avec l’appétit tous ses besoins renaissent ; il ouvre sa porte et va chercher de tous côtés à réparer ses forces épuisées. Les bourgeons et les nouvelles feuilles de la vigne provoquent son appétit. Il cause du dégât, non seulement par les parties qu’il absorbe pour lui servir d’aliment, par la rupture des fibres et des canaux séveux : mais la substance muqueuse qu’il laisse sur les bourgeons et les feuilles qu’il parcourt, obstrue les trachées, bouche les pores, et est un obstacle à l’aspiration et à la transpiration de la plante.

La grosseur de cet insecte et la lenteur de sa marche permettent d’en faire la chasse aisément. Il craint la chaleur, cherche l’ombre ; il se plaît à l’humidité. Dès que le soleil est parvenu à une certaine hauteur, vers six ou sept heures du matin, en été, il se tapit sous les feuilles les plus basses et les plus épaisses des sarmens, et y resté immobile jusqu’à ce que ses besoins, la fraîcheur et la rosée de la nuit l’invitent à recommencer ses courses et son pillage. Dans les terrains calcaires le vigneron rencontre souvent, en donnant les labours, des pierres plates et d’un volume assez considérable. Il est obligé de les tirer de la terre parce qu’elles sont un obstacle à la direction que veulent prendre les racines. S’il avoit l’attention d’en former d’espace en espace, de petits tas, en les plaçant de champ les unes contre les autres, les limaçons choisiroient leur ombrage pour retraite ; et il n’en échapperoit aucun à la recherche qu’on en feroit. Cette chasse ne pouvant être accompagnée d’aucune circonstance périlleuse, puisqu’un sac et une ficelle sont les seuls instrumens qu’elle exige, peut être confiée à des enfans. Ils se porteroient avec d’autant plus de plaisir à l’exécuter, qu’elle seroit tout à la fois un sujet d’exercice et un moyen de se procurer un aliment qui n’est pas dédaigné par-tout ; car si les limaçons de la vigne ne conviennent pas aux estomacs débiles des citadins, ceux des habitans des campagnes s’en accommodent impunément.

Il n’est pas aussi facile de détruire le ver de la vigne. Cet insecte est si petit qu’à peine on peut l’apercevoir ; il a la vue si perçante, l’ouie si fine, tant de souplesse et d’agilité dans ses mouvemens, qu’il est en garde contre toute surprise, et qu’il a l’art de se soustraire à tous les pièges. Heureusement il est polyphage, et par cela même, moins nuisible qu’il ne paroît l’être.

Le lieu où le charançon se loge et dépose ses œufs, est trés-apparent. Le mâle, la femelle et leur progéniture sont enfermés dans des feuilles roulées et à demi desséchées. Il s’agit de les couper, de les réunir dans un tablier, de les