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usage des ongles des pieds de mouton ; un nommé Lambert, cultivateur de vignes, dans le voisinage de Cousou, se servoit des retailles des étoffes de laine qu’il achetoit aux tailleurs et aux fripiers. Toutes ces matières ont réussi, comme engrais de la vigne ; elles contiennent en effet beaucoup d’hydrogène et de carbone, deux des principaux agens de la végétation ; enfouies dans la terre, leur décomposition est lente, presqu’insensible, et ne peut guère entraîner d’autre inconvénient que de communiquer au vin quelque goût particulier ; mais la difficulté de s’en procurer en quantité suffisante pour les grandes exploitations, ne nous permet pas de nous en occuper ici particulièrement, parce que nous n’avons en vue que d’établir les principes généraux de la culture des vignes.

L’automne est le tems qu’on choisit ordinairement pour le transport des engrais. Le cultivateur est moins pressé de travail pendant cette saison que dans les autres ; les terres, les engrais sont moins pesants et plus faciles à charroyer, parce qu’ils n’ont pas encore été pénétrés par l’humidité des pluies. On les transporte à dos d’ânes, de mulets ou de chevaux, dans des paniers dont le fond est à charnière d’un côté et tenu clos de l’autre, par le moyen d’une cheville. Il suffit de la tirer pour que, par l’effet du poids, le fond s’ouvre et la décharge s’opère. On laisse l’engrais ainsi amoncelé, d’espace en espace ; et la combinaison achève de s’opérer entre les différentes parties dont il est composé, en attendant le moment de l’étendre.

Dans les vignes à pentes douces, ou employe les voitures à ce transport ; et de toutes celles que nous connoissons, il n’en est point de plus commode pour terrer ou terrotter non-seulement les vignes mais tous les champs, à quelque sorte de culture qu’ils soient consacré ; que le petit tombereau à bascule et en forme de trémie, qu’on nomme Perronet, du nom du célèbre ingénieur qui l’a inventé. Un enfant de quatorze ou quinze ans peut le charger, le conduire et le décharger avec la plus grande facilité. On pénètre dans la vigne par les allées qui ont dû être formées au tems de la plantation, soit pour séparer entr’elles les races et les variétés des cépages, soit pour exporter la vendange. Elles servent aussi de dépôt aux engrais jusqu’à ce qu’ils soient répartis dans les massifs avec des hôtes ou des paniers ; travail dont les femmes et les enfans s’occupent à mesure qu’on taille et immédiatement avant le premier labour.

En le donnant on mêle l’engrais avec la terre, pour faciliter leur combinaison ; on l’enfouit pour le soustraire à l’air ; autrement il attireroit l’humidité et favoriseroit les gelées. On doit l’étendre le plus également qu’on le peut sur toute la surface du terrein, et non par poignées au pied des ceps : ce n’est pas à un ou deux centimètres de la souche que sont placés les orifices des racines ; elles se sont traînées bien au-delà ; d’ailleurs, elles savent s’étendre, se détourner s’il