faite à un centimètre, de distance de l’œil le plus voisin, et du côté qui lui est opposé. Par cette double attention, on évite que l’effet de la gelée, par laquelle le bois pourroit être surpris, ne s’étende jusqu’à la bourre ; on la préserve aussi de la chute de l’eau ou des pleurs dirigés vers elle par le talus de la coupure. Quand on voit le vigneron muni, pendant la façon de la taille, d’une ample provision d’onguent de Saint-Fiacre, pour couvrir les plaies qu’il est souvent obligé de faire à la souche, et employer adroitement le dos de sa serpette pour enlever les mousses naissantes, pour applanir les excavations qui servent d’asyle aux insectes malfaisans ou à leur ponte, on peut le juger un homme attentif et soigneux. Le maître peut se reposer jusqu’à un certain point sur sa vigilance. S’il commet quelques erreurs, elles seront plutôt l’effet de son peu d’instruction que de sa bonne volonté. N’espérez jamais autant du vigneron auquel vous aurez donné vos vignes à bail que du journalier que vous payerez bien. Le fermier ne fera rien pour ménager votre vigne, pour en prolonger la durée ; il fera tout pour en hâter la destruction : son intérêt le veut ainsi. Il taillera indifféremment sur le fort et le foible ; il n’a d’autre but que d’obtenir des récoltes abondantes ; vous serez bien heureux si la taille de sa dernière année de jouissance ne met pas un terme très prochain à la vôtre ; car il ne taillera vraisemblablement qu’à vin ou qu’a mort, expressions qui sont synonymes quant à l’effet.
La nature a pourvu la partie supérieure des sarmens de la vigne de vrilles ou de tenons pour s’accrocher aux plantes voisines, se soulever à mesure que celles-ci croisent elles mêmes, et, par ce moyen, maintenir à une certaine distance de la terre les grappes suspendues à la partie inférieure des rameaux. La température de nos climats ne nous permettant pas de leur présenter des arbres ou des arbrisseaux pour supports, nous sommes obligés de les accoler à des pieux qu’on nomme échalas, pesseaux ou charniers formés de bois mort. La façon de les dresser et de les disposer les uns et les autres, n’est rien moins qu’indiffèrent pour la qualité des fruits de la vigne. L’ouvrier a prescrit, en quelque sorte, par la forme de la plantation et par l’exécution de la taille, la quantité de principes nutritifs destinés à être convertis en sève ; par le palissage, il dirige la marche de cette sève, il donne aux canaux qu’elle parcourt une direction plus ou moins propre à en faciliter l’élaboration. La plus mauvaise de toutes les méthodes de palisser, et malheureusement la plus commune, est celle par laquelle on contraint la sève de se porter verticalement de bas en haut, attachant et la tige et les sarmens à un pieu perpendiculairement planté près d’eux. La sève s’élance alors, et avec une rapidité étonnante, vers l’extrémité supérieure des pousses nouvelles. Elle ne peut ni séjourner, ni refluer vers les grappes ; elle est entièrement convertie en bois nouveau, et consommée par la formation de ces