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le vin qu’on retire du raisin d’un cep lié à un arbre, n’égalera jamais en bonté celui d’une vigne basse ; que le fruit des hautains ne mûrit jamais aussi bien que celui des vignes basses, parce que celui-ci est placé de manière à recevoir la réverbération du soleil, qui est au moins aussi chaude que le soleil même. Le plan incliné des coteaux le réfléchit mieux que toute autre exposition ; d’ailleurs, le raisin enfermé dans les têtes des arbres, est trop couvert par leurs feuilles et par les siennes propres, pour éprouver le contact des rayons. Deux raisons peuvent avoir donné lieu à ce genre de culture. On aura reconnu que la vigne, plantée dans un bon terrain, pompe trop de sève par ses racines, et qu’il falloit occuper cette sève à pousser des bois vigoureux, afin de l’atténuer et d’en faciliter l’élaboration ; mais on n’avoit pas encore observé que la vigne pompe pendant la nuit l’humidité répandue dans l’atmosphère ; que cette humidité, aspirée par les trachées, descend alors vers les racines, où elle se réunit avec le surplus des principes séveux, qui ne s’est pas élevé pendant le jour, et que la transpiration n’a pu dissiper. L’absorption par les plantes est toujours en raison de la plus ou moins grande surface que présentent les feuilles. Ainsi, plus une vigne a d’étendue, plus elle a de surface ; plus elle a de surface, plus elle pompe d’humidité pendant la nuit, et plus elle augmente, par conséquent, le volume de ses principes séveux ; de là la trop grande aquosité du vin ; de-là son, peu de qualité, son peu de durée.

Peut-être aura-t-on cru aussi ne pouvoir mieux faire que de suivre l’exemple des Italiens, qui ont cultivé la vigne avant nous ; mais on n’a pas fait attention que la châleur est plus vive, plus forte, plus soutenue en Italie que dans nos provinces les plus méridionales, et qu’excepté dans un très-petit nombre de crûs, les vins de ces contrées sont communs et peu propres à être conservés.

La culture dans laquelle on adopta la seconde espèce des hautains, est moins vicieuse que la première. Dans celle-ci, la vigne présente moins de surface : on est obligé d’étendre horizontalement, souvent même de courber les sarmens ; la sève ne montant plus alors en ligne droite, elle est moins véhémente dans sa course ; quand elle parvient aux bourgeons, elle est en moindre quantité et mieux élaborée. Le défaut de cette culture ne consiste que dans la trop grande élévation de ses branches à fruit : et l’expérience prouve que, même dans nos provinces les plus méridionales, le raisin qui vient à la hauteur de plus de deux mètres, ne donne que des vins sans caractère et sans durée. Quel est donc le juste point d’élévation auquel le cultivateur arrêtera les tiges de sa vigne, et d’après quels principes se conduira-t-il à cet égard ? D’après ceux qui l’ont dirigé dans l’espacement, lors de la plantation. Dès qu’il a cru devoir restreindre le volume de ses plantes, par rapport à leur grosseur, pour ne leur faire aspirer qu’une quantité de sève rela-