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Modène, avec cette seule différence qu’en Italie, les vignes sont accolées à des ormes ». Wright décrit, avec la même complaisance, le spectacle qu’offrent celles-ci à l’œil du voyageur. Le sol de la Lombardie[1] est uni et riche ; il contient de superbes pâturages, des champs fertiles et beaucoup de mûriers blancs destinés tout à la fois à produire la nourriture des vers à soie, et à servir de support aux vignes qui montent jusqu’à l’extrémité de leurs branches. Ce pays est le plus beau de l’Italie, si l’on en excepte la campagne des environs de Naples. On y voit peu de bois propres à la charpente ; mais seulement des ormes et des peupliers qui servent aussi d’appui à la vigne. Les chemins qui traversent cette contrée, sont larges, unis et bordés de haies taillées et soignées avec la plus grande exactitude. De ces haies sortent, d’espace en espace, à la distance de quarante ou cinquante verges les uns des autres, des arbres autour desquels monte la vigne. Après s’être entrelacée dans leurs branches, elle en sort pour se former en guirlandes qui pendent d’arbre en arbre au dessus des haies. Les sarmens s’étendent ensuite à droite et à gauche ; on les soutient avec des pieux ou des poteaux plantés parallèlement aux arbres ; et ils forment alors des espèces d’auvents, des toits obliques qui régnent des deux côtés des chemins, et au dehors comme au dedans. Cette architecture naturelle s’étend dans presque toute la Lombardie.

La plupart de nos hautains de Provence présentent un spectacle non moins agréable, non moins pittoresque. L’œil du voyageur, peu accoutumé à ce genre de plantation, promène avec plaisir ses regards sur les différentes productions du sol : tout y annonce l’ordre symétrique d’un jardin. Ici un rang d’oliviers forme une espèce d’espalier ; le verd pâle de leurs feuilles contraste merveilleusement avec celui du blé qui croît à leurs pieds ; la vigne forme un peu plus loin un autre espalier, ou bien elle y est plantée en masse. Quelques particuliers la marient aussi avec l’amandier ou l’ormeau, et les sarmens se mêlant avec leurs branches, forment des têtes singulières et touffues, d’autres, enfin, laissent la vigne sans soutien, et, dans un sol fécond, elle pousse des jets forts et vigoureux, qui s’entrelacent les uns dans les autres. Il faut convenir que ces mélanges de diverses récoltes forment un ensemble charmant ; mais que d’abus décrits en peu de mots ! car il ne s’agit pas ici du coup-d’œil : c’est la production qui nous intéresse. Nous y reviendrons tout-à l’heure.

La seconde espèce des hautains diffère de la première par le genre de son appui ; au lieu d’arbres, on donne pour support à la vigne des perches qui, par leur entrelacement, forment des treillages perpendiculaires, qui s’élèvent souvent jusqu’à deux ou trois mètres.

  1. Voyage d’Italie, tome I, page 31.