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observer, pour avoir des résultats certains à communiquer, on est tenté de ne regarder un tel projet que comme un beau rêve. Ne seroit-il donc pas possible d’arriver au même but par une voie plus courte et par des moyens plus simples et plus sûrs ?

Il me semble qu’un cultivateur, exercé à observer et secondé par quelques habiles artistes, pourroit parvenir, en deux ans, à former un excellent herbier artificiel de toutes nos espèces, races et variétés de vigne. La collection des champignons et des plantes vénéneuses de la France, par Bulliard, prouve que l’art de graver en couleur est parvenu à un degré de perfection tel qu’il peut transmettre et les contours les plus déliés des formes et les nuances les plus délicates des couleurs.

Nos artistes réunis se mettroient en marche vers le milieu de thermidor, et commenceroient leur travail par celui des vignobles, qui est situé le plus au nord de la France, s’acheminant ainsi de vignobles en vignobles, du nord au midi. Je les fais partir de la région septentrionale, parce que les vendanges étant plus tardives dans celle du sud, ils parviendront assez tôt dans celle-ci pour y trouver encore les fruits suspendus aux sarmens.

Le cultivateur décriroit un individu entier de chaque race ou variété qu’il rencontreroit au point du départ, donnant une attention toute particulière aux parties de la plante par lesquelles il est le plus facile de distinguer les différentes essences, telles que les feuilles et les fruits ; et l’artiste en exécuteroit avec le même soin un dessin colorié, en ayant soin de marquer les différences des sarmens de chaque race ou variétés, et de les rendre sensibles aux yeux par le moyen du dessin. À mesure que les comparaisons scroient faites, on sedébarasseroit de l’ancien sarment pour le remplacer par celui auquel il a été comparé, et se mettre ainsi à portée de renouveller de suite, et de proche en proche, la même opération, jusqu’au terme du voyage. Ce moyen est peut-être le seul propre à faire connoître l’influence des diverses terres et des différens climats, sur les races et les variétés de la vigne. Tout ce qui a rapport à cette diversité des terreins, des climats et du genre de culture qui y est suivi, formeroit un des principaux objets du travail.

On ne négligeroit pas sur-tout de désigner les plantes qui croissent spontanément dans les vignobles qu’on parcourroit, parce qu’on peut tirer, de cette connoissance, des renseignemens plus certains que par les descriptions les plus exactes. Toutes les dénominations et les innombrables variantes sous lesquelles les cépages sont connus dans tous les cantons où ils pénétreront, seront annotés avec le plus grand soin, puisque ce n’est que par leur concordance qu’on pourra parvenir à en simplifier la nomenclature.

Si les voyageurs étoient parvenus dans le département des Bouches-du-Rhône, vers la mi-