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ceroit le laboureur à un surcroît de travail long et pénible, et la petite quantité de terre rabattue par le versoir seroit insuffisante pour couvrir la totalité de la plante. Or, on sait que tout ce qui excède la surface du champ, en fait d’engrais, se dessèche à l’air en pure perte, et sans qu’il en puisse résulter le moindre avantage.

Espèces ou variétés. Culture.

La botanique compte au moins vingt espèces de vesces, tant annuelles que vivaces et bis-annuelles. Presque toutes sont également propres à la nourriture des bestiaux ; mais il ne paroit pas qu’en France on en ait cultivé d’autres que la vesce commune à semences noires et celle à semences blanches : elles sont annuelles l’une et l’autre. On donne communément la préférence à la première, parce que, produisant un plus grand nombre de tiges, elle fournit un fourage plus abondant. D’ailleurs, la semence d’un gris noirâtre est moins apparente que la blanche, et les pigeons en détruisent moins au tems des semailles.

Miller, dans son dictionnaire des jardiniers, et Thouin, dans le recueil des mémoires de la société d’agriculture de Paris, regrettent qu’on ne cultive pas dans les pays tempérés de l’Europe, les vesces bis-annuelles et vivaces, dont les qualités, comme fourage, ne sont pas inférieures à celles des vesces annuelles. Il est vrai que, si ces plantes sont abandonnées à elles-mêmes, elles se couchent sur la terre, et s’étendent à de grandes distances ; leurs tiges, entassées les unes sur les autres, se dépouillent de leurs feuilles, jaunissent par le défaut d’air, et se gâtent par l’humidité. Le seul moyen de remédier à cet inconvénient, seroit d’employer des rames pour soutenir les plantes de cette nature ; mais, où en trouver dans les cantons où le bois est rare ? et dans ceux où il est commun, combien de tems ne faudroit-il pas consacrer à cette opération ? En supposant, enfin, cette main-d’œuvre praticable, comment s’y prendroit-on pour récolter le fourage ? car les rames formeroient un obstacle insurmontable au jeu de la faux. Le vrai moyen de former d’excellentes prairies artificielles des vesces bisannuelles, seroit de semer avec elles d’autres plantes douées aussi des qualités propres à faire un bon fourage, et dont les tiges, s’élevant en lignes droites, auroient, comme les luzernes, les trefles, le sainfoin, les mélilots, etc. assez de consistance pour servir d’appui aux frêles rameaux des vesces. Thouin indique, pour former de telles prairies, d’une part, la vesce bis-annuelle, à plusieurs fleurs sur chaque pédoncule sillonné, avec, pour la plupart, douze lobes unis, et en forme de lances sur chaque feuille : Vicia biennis, pedunculis multifloris, petiolis sulcatis, subdodecaphyllis, foliolis lanceolatis, glabris. Lin. ; et de l’autre, le grand mélilot à fleur blanche : Trifolium racemosis nudis, dispermis rugosis, acutis, caule erecto. Lin. Voici ses propres expressions : « La