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propriétés ne sont pas assez respectées, elles auroient été dévorées dans les champs par les troupeaux. Au commencement de mars 1781 je semai dans des caisses & en pleine terre. Les graines des caisses & quelques unes de celles dont il est question dans la note 2 ci-dessus, dès qu’elles furent en état d’être transplantées, furent placées dans une plate-bande dont la terre avoit été bien préparée ; La chaleur se soutint constamment pendant tout l’été & bien avant dans l’automne ; malgré cela aucune des plantes ne se disposa à fleurir. L’hiver de 1781 à 1782 fut pour ainsi dire nul, & je préservai mes plantes du peu de froid qui se fit sentir, en les couvrant avec de la paille, & au printemps leurs tiges fleuries s’élevèrent à la hauteur de trois pieds. Le bétail mangea avec avidité celles que je coupai à cette époque, & le reste graina sur pied & se dessécha après la complette maturité de la graine. Celles que j’avois fauchées restèrent vertes & poussèrent de nouvelles feuilles jusqu’à l’hiver. Jugeant qu’elles étoient dans leur plus grande force, & qu’elles soutiendroient les petites gelées des climats méridionaux, je ne les couvris pas, & un froid de quatre degrés les fît périr. J’ai fait répéter chez un de mes amis les mêmes expériences à Lyon ; toutes les plantes ont péri pendant l’hiver, ainsi que quelques pieds renfermés dans une orangerie où les orangers avoient un peu souffert de l’âpreté du froid.

Il résulte donc de ces expériences, 1°. que le sulla ne fleurit point pendant la première année, quoique semé en avril ; 2°. que ses feuilles restent couchées sur terre & sont peu nombreuses, jusqu’au moment où la plante commence à pousser ses tiges ; 3°. que ce qui constitue vraiment la récolte, ce sont les tiges fleuries & feuillées ; 4°. que dans la première année, même un peu avant l’hiver, la totalité des feuilles radicales, ne vaut pas la peine d’être fauchée ; 5°. enfin, que quand même l’hiver seroit assez doux pour conserver la plante & la mettre dans le cas de monter en tiges, cette plante n’est que bisannuelle pour nos climats, & ne produit pas autant que nos lusernes, parce qu’elle ne souffre qu’une coupe.

N’envions donc pas à Malthe, à la Calabre & aux pays méridionaux le sulla ; nos lusernes sont préférables, puisque lorsque le sol leur convient, elles y subsistent en pleine force pendant douze & même jusqu’à vingt ans. Toutes belles spéculations faites sur le sulla, sur ses avantages à le naturaliser en France, sont brillantes dans le cabinet, où tout paroît possible ; mais le cabinet ne donne ni le sol fertile de la Calabre ni son soleil.

D’autres cultivateurs ont sans doute été plus heureux que moi, si leurs écrits sont fondés sur l’expérience & la vérité. Je dis ce que j’ai fait, ce que j’ai observé avec le plus grand soin, & j’assure que mes résultats n’ont pas été heureux.


SAISON. C’est une des quatre parties de l’année divisée par trois mois, connues sous la dénomination de printemps, été, automne & hiver. Au printemps, le soleil entre dans le premier degré du bélier, & cette saison dure jusqu’à ce que le soleil arrive au premier degré de l’écrevisse. Ensuite l’été commence & subsiste