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sont un peu de convention, & que si elles étoient aussi communes que les panaches découpés & piquetés, & ceux-ci plus rares, peut-être les fleuristes préféreroient les derniers ; mais loin de disputer des goûts, on doit y applaudir, parce que l’enthousiasme, soutenu de la patience, procure sans cesse à l’amateur des jouissances nouvelles. Quel cultivateur pourroit se persuader que ces belles hachures, que ces beaux panaches sont les indicateurs d’un genre de maladie de la plante ? En effet, veut-on qu’ils disparaissent, que le fond naturel du pétale, ou feuille qui compose la fleur, reprenne le dessus, il suffit de replanter l’oignon dans une terre bien substancielle, bien chargée de fumier avant sa décomposition en terreau. Le fleuriste, qui ne se doutera pas de son effet, dira, la fleur s’est enivrée, mais sa baguette a été plus élevée, & la fleur plus grande & plus nourrie. Si, au contraire, il plante l’oignon dans un sol maigre, tel que je l’ai indiqué ci-dessus, les panaches se multiplieront & se perfectionneront. C’est donc, en général, à la qualité du sol dans lequel l’oignon est planté, que les panaches doivent, sinon entièrement leur origine, mais au moins leur perfectionnement idéal.

Je crois faire plaisir aux fleuristes en leur annonçant que l’oignon qui produit la fleur, ne meurt pas chaque année comme ils le pensent. Ce qui les a sans doute induits en erreur, c’est de voir, lorsqu’ils arrachent les oignons de terre, que la tige qui a donné sa fleur, est détachée des cayeux & de l’oignon voisin ; enfin qu’elle prend par-dessous le plus gros oignon, & qu’elle part de l’ancien bourrelet formé par la couronne. Ils doivent observer que la pulpe de l’oignon, du côté de cette tige, n’est pas aussi renflée que de l’autre côté, que l’oignon y est un peu applati & même un peu creusé vers sa base. Je demanderai à l’amateur S’il a jamais trouvé les débris de l’ancien oignon ? S’il répond que ces débris ont pourri, & sont réduits en terreaux, je nierai le fait, & je lui proposerai l’expérience. Qu’il plante dans du sable de couleur jaune un oignon de tulipe, qu’il le laisse végéter jusqu’à la dessiccation complette de la plante ; alors qu’il enlève avec soin la terre jaune qui enveloppe l’oignon. Si l’oignon a pourri, s’il est réduit en terreau, ses débris donneront un terreau de couleur plus ou moins brune. Or, s’il trouve du terreau ainsi coloré, ou des dépouilles encore reconnaissables de l’ancien oignon, je conviens que j’ai tort, & qu’il a raison ; qu’il fasse donc cette expérience, & il saura ainsi que moi ce qu’il doit croire.

La vérité est, qu’à mesure que la tige s’élance, elle use les tuniques dont est composé l’oignon, sur le côté le plus faible ; que, petit à petit, elle sort de ce côté ; & lorsqu’elle est sortie, les tuniques se régénèrent & restent moins épaisses & moins compactes que du côté opposé. Si, après sa dessiccation, on coupe transversalement l’oignon, on se convaincra de cette vérité.

La tulipe se multiplie & se reproduit par les cayeux ou petits oignons qui poussent tout autour de la couronne ; mais on ne perpétue par-là que la même espèce jardinière. (Consultez ce mot) L’amateur veut des