Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/800

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les laissât se ressuer sur le champ où elles ont été cultivées.

Une simple charrue suffit pour en déchausser par jour un arpent & demi, & six enfans bien d’accord peuvent la desservir, munis chacun d’un panier, pour porter à un tas commun les racines dépouillées de leurs filamens chevelus.

Pour la récolte à bras, il faut se servir, non pas d’une bêche ou d’une houe, mais d’une fourche à deux ou trois dents ; faire le triage des grosses d’avec les petites, & mettre de côté celles qui sont entamées, pour les consommer les premières, & rejeter les gâtées.

De tous les moyens proposés pour multiplier les bonnes espèces de pommes de terre, & prévenir leur dégénération dans la qualité & dans le produit, il n’y en a point de plus efficace que le semis ; il faut de temps en temps renouveler les espèces par cette voie.

En cueillant, la veille de la récolte, les baies de l’espèce qu’on a dessein de propager, en les semant au printemps sur des couches, en les transplantant & les cultivant comme la plante ordinaire, on obtient une nouvelle génération, qui, pendant une longue succession d’années, conserve sa fécondité & tous ses caractères.

Avant de porter les pommes de terre à la cave, au grenier ou dans les différens endroits destinés à les conserver pendant l’hiver, il faut les laisser se ressuer au soleil, ou à l’air quand il ne gèle point ; il convient de les mettre toujours sur des planches ou de la paille, éloignées des murs, de les remuer quelquefois quand il règne une humidité chaude, & sur-tout, de ne pas les amonceler en tas trop épais.

Pour faire sécher les pommes de terre, il faut préalablement leur faire subir quelques bouillons, les couper ensuite par tranches, & les exposer au-dessus d’un four de boulanger, les mettre ensuite dans un pot avec un peu d’eau sur le feu ; il en résulte un aliment comparable à celui de la racine fraîche.

Un autre moyen de perpétuer, d’étendre l’usage des pommes de terre, d’en tirer même parti lorsqu’elles valent peu de chose en substance, c’est d’extraire leur farine, amidon ou fécule, pourvu qu’elles ne soient ni cuites ni séchées, ni altérées à un certain point.

Une livre de pommes de terre donne depuis deux jusqu’à trois onces d’amidon ; les rouges en fournissent plus que les blanches, & celles-ci davantage que la même espèce récoltée dans des terres fortes & humides.

On prépare avec la farine ou amidon de pommes de terre au gras ou au maigre, une bouillie légère, substancielle, & infiniment préférable à celle de froment ; elle peut servir tout-à-la-fois de remède & d’aliment ; elle convient aux vieillards, aux convalescens, aux estomacs foibles ; elle augmente le lait des nourrices, & prévient les coliques dont elles sont quelquefois tourmentées.

Il n’y a pas dans les campagnes de ménage assez pauvre, pour ne pas pouvoir, avec une rape & un tamis, se procurer cet amidon pour les besoins de la famille.

L’amidon de pommes de terre qui ne sauroit être employé pour la coiffure, fait de la colle & un bon empois ; serré dans un endroit