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printemps & pendant l’été. Or, si le mûrier subsistoit, des ormeaux (& j’en ai la preuve) auroient encore mieux résisté. Il en est ainsi des peupliers d’Italie, des ypréaux, &c… Au printemps, la terre absorbe une grande quantité d’eau-pour fournir aux besoins de la végétation, & la chaleur de l’été en évapore une si grande quantité, que l’on ne craint pas que les eaux pluviales fassent pourrir les racines. Ceci posé, je dis que l’on doit planter dans les fossés, & que cette plantation concourt à la conservation des chemins. Il n’est pas nécessaire de prévenir que la qualité des arbres doit être proportionnée à celle du sol. Il seroit absurde de planter un saule sur le sommet d’une montagne, & un sycomore dans un fond bas & marécageux. Les extrêmes ne prouvent rien.

Je suppose la plantation fixée à 36 pieds, je réduis cette longueur du fossé à vingt-quatre. Les fossés sont par-tout de six pieds de largeur sur trois pieds de profondeur. À tous les 24 pieds je laisse une terrasse de douze pieds de base, & de huit à son sommet, mais moins haute de six à huit pouces que les bords du chemin. C’est au milieu de cette terrasse que l’arbre est planté. On voit qu’à ses deux extrémités il se trouve une inclinaison de deux pieds de son sommet à sa base, soit afin de maintenir son terrain, soit afin que les eaux partent sur cette terrasse pour s’écouler dans le fossé suivant. L’eau trouvant une pente douce, ne sillonne & n’entraîne pas le terrain.

Si la pente du chemin est rapide, au lieu de douze pieds de base, on lui en donnera quatorze ; & la longueur du fossé se trouvera réduite à vingt-deux & même à vingt, si le besoin l’exige, en raison de la grande pente du chemin. Les talus de ces terrasses seront gazonnés, ainsi qu’un pied de largeur sur la surface de la terrasse qui avoisine les talus. Il suffit de semer la graine de foin, lorsqu’on creuse les fossés ; elle germera & sortira de terre après la première pluie ou au renouvellement de la belle saison, ou enfin en septembre ou octobre, si elle a été semée pendant l’été.

Cet expédient rend les chemins parfaitement libres, & les amateurs de la belle ligne droite, & des bords des fossés tirés au cordeau, n’auront plus d’obstacle à opposer aux plantations sur la lisière des routes.

Il résulte plusieurs avantages de cette nouvelle destination des fossés. Si le chemin est en pente, le fossé devient un ravin, lorsqu’il survient de grosses pluies, & les bords du chemin sont dégradés. Les terrasses au contraire forment autant d’écluses qui s’opposent à l’affouillement des eaux. Comme la superficie est de six à huit pouces plus basse que le sol du bord de la route, l’eau surabondante s’écoule d’une écluse à l’autre par une pente douce & gazonnée, dès-lors l’affouillement est impossible. Le terrain de la surface ne peut pas être entraîné, puisque ses deux extrémités sont gazonnées sur la largeur d’un pied, & leur gazon se lie avec celui de la portion du chemin qui y correspond. Chaque écluse devient un dépôt, un réservoir d’engrais, dont les racines de l’arbre planté profitent, & dans