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uns conseillent d’arroser les plantes avec de l’eau dans laquelle on aura fait infuser ou bouillir des feuilles de noyer, de l’absinthe, de l’assa-fœtida. & autres drogues semblables. Sans chercher à examiner & à constater ici l’efficacité de ces recettes, je demande s’il est possible de préparer ces mixtions en quantité suffisante pour arroser convenablement toutes les plantes d’un champ. Si l’on considère que les chenilles se cachent dessous les feuilles, on concevra sans peine que dans leurs retraites elles bravent toutes les aspersions que l’on fait contre elles. On dira peut-être que la feuille reste imprégnée de cette saveur, soit ; mais l’amertume n’est pas un poison pour les chenilles, & d’ailleurs les rosées, les pluies jointes à leur perpétuelle transpiration, ont bientôt dépouillé les feuilles de cette odeur & saveur factices. Supprimez les feuilles, la recette est plus expéditive & plus sûre. (Consultez l’article Cloque)

À l’approche de l’époque des gelées d’hiver, chacun suivant son climat, il convient de se hâter de déterrer les raves & les navets. À cet effet, des hommes & des femmes, la pioche à la main, cernent & fouillent la terre tout autour de la racine & l’enlèvent sans l’endommager. On coupe, les feuilles à leur base, à cinq ou six lignes au-dessus du collet de la racine, & on recueille ces feuilles, dont les plus intactes sont portées à la métairie pour la nourriture du bétail. Il s’agit actuellement de conserver ces racines pendant tout l’hiver. On a imaginé plusieurs moyens.

Le premier, le plus économique, est d’ouvrir circulairement une fosse dans une partie du champ même, de cinq, six, à huit pieds de profondeur ; la terre que l’on en retire est mise de côté. On a soin que la partie inférieure de la fosse, bombe dans son milieu & assez fortement, afin que si l’eau des pluies ou de filtration y pénètre, elle ait un écoulement. On sent combien il est avantageux que le fond de cette fosse porte sur un sol capable de laisser filtrer l’eau : on en couvre tout le fond, ainsi que les parois, avec beaucoup de paille, & on place les raves & navets, rang par rang. Lorsque le monceau est parvenu, à peu près, à un pied près du bord supérieur de la fosse, on le couvre de nouveau avec beaucoup de paille, & on jette ensuite par dessus de la terre tirée de la fosse, en la piétine, on la serre, on fait bomber le milieu, de manière que les eaux pluviales soient portées loin de la fosse. Quelques personnes garnissent d’un lit de paille l’entre deux de la partie supérieure de la terre, ce qui contribue beaucoup à diriger le cours, des eaux, & à préserver la fosse de toute humidité ; un chapeau ou couvercle en paille bien serrée, placé par dessus la terre & maintenu avec des piquets & des lattes transversales, produiroit beaucoup mieux le même effet, & préserveroit encore la totalité des gelées.

Dans plusieurs endroits on se contente de bomber le terrain sur une partie inclinée du champ, d’en battre fortement la terre, ainsi que dans la circonférence ; on enfonce à un pied de profondeur cinq ou six piquets forts, & longs de huit à dix pieds, & quelques piquets moins forts & tout aussi longs entre deux ; on les réunit tous par leur sommet, au moyen de fortes liga-