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Temps ou les accident surviennent après la morsure d’un animal enragé.

Une plaie faite par un animal enragé, abandonnée aux seuls soins de la nature, ou pansée simplement avec de l’eau-de-vie, ou quelqu’autre vulnéraire semblable, se guérit au moins aussi promptement qu’une plaie faite par un animal sain ; ce n’est que quelque temps après qu’une douleur locale annonce l’action du venin renfermé dans la plaie, & bientôt on voit naître les accidens les plus graves ; ces accidens se développent plus ou moins promptement dans les différentes espèces d’animaux ; en général, un chien ou un bœuf, qui a été mordu par un animal enragé, ne passe pas le neuvième jour, & ce n’est que trente ou quarante jours après la morsure, que l’on voit cette maladie se déclarer dans l’homme ; cependant nous l’avons vu survenir seulement au bout de quarante-neuf jours, dans un petit mulet, âgé de cinq ans. (Voyez cette observation, Journal de Médecine, mai 1781, page 420.) Ces différences dépendent du tempérament des animaux mordus, de la violence de la maladie dans l’animal enragé, de la nature de la plaie, de la saison, tout autant d’agens qui doivent, sans contredit, accélérer plus ou moins le développement de ce terrible venin.

Traitement de la Rage.

Le bétail est si précieux aux habitans de la campagne, que nous nous faisons un devoir d’indiquer les précautions à prendre pour de le conserver, & prévenir les suites funestes de la morsure d’un animal enragé ; le mal est le même que dans l’homme, à quelques petites différences près ; seulement dans les quadrupèdes, il faut se hâter d’employer les remèdes, parce qu’en général le venin se développe beaucoup plus promptement que dans l’homme.

Si donc un bœuf, un cheval a été mordu à la queue, à l’oreille, au lieu de porter le caustique dans la morsure, comme il est d’usage chez l’homme, il est plus simple, il est aussi plus sûr de couper sur le champ cette partie de peu d’importance pour la vie de l’animal ; on passera un fer rougi sur la place saignante, ce qui arrêtera promptement l’hémorragie, & fournira une longue suppuration ; on pansera ensuite la plaie avec un digestif térébenthiné ; mais si la morsure est dans un endroit dont on ne puisse faire l’extirpation, après avoir coupé le poil, lavé fortement la partie, on agrandit la plaie, & on y porte le fer rouge, de manière à pénétrer dans toute l’étendue de la blessure ; on la panse ensuite avec un onguent digestif que l’on anime de temps en temps avec les cantharides ou la pierre à cautère ; après quelques semaines on laisse fermer la plaie.

Pendant le traitement on sépare l’animal blessé, afin que les autres ne viennent point lécher sa plaie ; il faut aussi que celui qui la panse ait soin de se laver les mains, soit avec du savon, soit avec du vinaigre, après chaque pansement.

Nous avons dit plus haut que le venin étoit porté dans la plaie par la dent de l’animal ; nous croyons devoir ajouter qu’il y reste plus ou moins longtemps avant d’exercer ses ravages ; il faut donc empêcher son