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dans la terre par deux bons labours, y devient un excellent engrais pour la récolte suivante en grains. C’est une des meilleures plantes pour alterner les champs dans les parties de nos provinces méridionales. Quant aux pays qui s’éloignent de cette température & de cette siccité pendant l’été, on fera très bien d’y suivre dans tous ses points la culture publiée par M. l’abbé de Commerell, imprimée par ordre du gouvernement.

Instruction sur la culture, l’usage et les avantages de la Bette-rave champêtre.

§. Ier

Description de la Bette-rave champêtre, & ses principales propriétés.

La plante (c’est M. l’abbé de Commerell qui parle) qui est l’objet de ce mémoire, est peu connue en France ; elle n’a pas encore de nom propre en françois.

En Allemagne, où l’on en retire les plus grands avantages, on rappelle Dick-Ruben (gros navet), Dick-Wurzel (grosse racine), Manuel-Wurzel (racine de disette).

L’auteur d’un mémoire adressé à la société royale d’Agriculture de Paris, & dont cette compagnie a fait publier un extrait, lui a dernièrement donné le nom de turlips, qui a l’inconvénient de ressembler trop à celui de turneps,[1] & de pouvoir ainsi induire en erreur les habitans des campagnes. ;

L’analogie avec un nom anglois n’étant pas une raison pour en former un françois, & les trois noms allemands n’ayant ni précision ni justesse, on préfère d’en donner à cette plante un qui exprime ses propriétés, & de la désigner par celui de bette-rave-champêtre. En effet, c’est une bette-rave moins délicate que la bette-rave commune ou de jardin ; c’est une bette-rave qui réussit aisément dans les champs, & qui offre une variété de la bette-rave commune, ainsi que la grosse rave ou le turneps en sont une du navet. Le turneps & la grosse rave, moins sucrés que le nayet, viennent hors de terre & n’y tiennent que par une radicule, tandis que le navet s’y plonge en entier. La bette-rave champêtre, plus dure & moins sucrée que celle de nos jardins, vient aussi à la superficie du sol, n’y tient que par la pointe, ne le pénètre que jusqu’à moitié de son volume ; elle n’acquerroit pas sa beauté, & seroit même exposée à pourrir, si l’on vouloit la couvrir de terre.

Elle a une autre propriété très-précieuse, c’est de pouvoir être effeuillée à plusieurs reprises, de fournir ainsi un fourrage renaissant, & de n’en devenir que plus belle, tandis que l’on nuiroit à la bette-rave commune en l’effeuillant.

La culture de la bette-rave champêtre est facile, ses avantages sont

  1. Note de l’Éditeur. Je ne sais d’où vient la manie d’introduire des noms nouveaux, & de franciser des noms anglois pour désigner des plantes qui sont connues de toute ancienneté en France. Le Turneps, est le gros navet, que l’on cultive de temps immémorial en Dauphiné, dans le Lyonnois, le Beaujollois, las Savoye, ainsi qu’on le verra au mot Rave. Le fameux Reis-grass, est le fromental de tous nos prés, &c.