Si l’extension des racines n’étoit pas proportionnée au volume des branches, le moindre effort du vent déracineroit l’arbre : c’est ce qu’on voit journellement arriver aux arbres taillés en boule. Les racines servent donc non-seulement à maintenir l’arbre dans sa position droite par la résistance qu’elles opposent sur tous ses côtés, mais encore à correspondre à la multiplicité des branches.
De la multiplicité des racines. Ce n’est pas simplement pour assujettir un arbre, que la nature lui a imposé la loi de produire un grand nombre de racines. On sait que les feuilles sont aux branches & à l’arbre ce que les poumons sont au corps de l’homme ; c’est par elles que l’arbre respire, inspire & transpire. Les racines leur envoient pendant le jour les matériaux de la séve, & tout ce qu’il y a de superflu & de mal élaboré est rejeté par la transpiration de toutes les parties extérieures de l’arbre. Mais pendant la nuit, ces mêmes fluides déjà élaborés redescendent aux racines pour y subir une nouvelle préparation, y recevoir un nouveau ferment, en s’unissant avec les nouveaux matériaux de la séve pompés par elles. C’est ainsi que par une ascension perpétuelle pendant le jour, & une descension pendant la nuit, enfin par la transpiration & les sécrétions, les parties les plus atténuées, les plus huileuses, parviennent & forment l’amande ou graine ; d’autres préparent les matériaux de la pulpe qui constitue le fruit ; enfin il en est qui donnent l’existence aux feuilles, & augmentent la charpente des parties ligneuses des branches, du tronc & des racines. Il est plus que probable, & on doit en juger ainsi par l’inspection de l’écorce des racines, qui est criblée de pores plus visibles que dans l’écorce du tronc &. des branches, & par la mollesse de son bois, qu’il doit s’y faire un grand travail, une grande élaboration de la séve & de très-fortes sécrétions. Leur contexture semble l’annoncer. En effet, si ce grand travail ne s’y exécutoit pas, que deviendroit cet amas de séve qui y reflue, lorsqu’un froid précoce hâte & fait tomber des feuilles qui naturellement dévoient encore rester un mois sur l’arbre ? Que deviendroit cette séve de la vigne, assez abondante pour fournir un torrent de pleurs au premier printemps, lorsque la fraîcheur en interrompt le cours ? Sans la facilité des sécrétions, il y auroit stagnation, corruption de séve, souffrance & altération dans l’arbre. La nature toujours guidée par la main invisible & puissante de son auteur, a tout prévu & a remédié à tout ; elle a multiplié les racines en nombre proportionné aux branches, afin que les sécrétions fussent égales ; mais comme les branches & les feuilles ont l’air atmosphérique pour réservoir, & qu’il ne leur oppose aucun obstacle, il étoit inutile que leur bois & que leur écorce fussent criblés de pores aussi larges que ceux des racines environnées par la terre, qui est un réservoir plus épais & plus dense. C’est encore afin d’y faciliter les sécrétions, que la terre entretient une humidité qui rend leurs pores plus perméables à l’air & aux substances superflues & rejetées du torrent de la circulation.
S’il règne une si belle harmonie, une si grande concordance entre les racines & les branches, si les chevelus