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les fleurs doivent s’y succéder, le jardinier n’a guères l’occasion de renouveler la terre pendant les trois belles saisons ; & dans l’hiver, occupé d’autre soins, il néglige cette partie. Si on considère combien on demande à ce sol, combien les plantes qu’on y renouvelle sans cesse en effritent la terre, on sera forcé de convenir que leur végétation & leur fleuraison, seront toujours très-médiocres ; cependant les plate-bandes doivent être un des plus agréables objets de décoration d’un jardin. Si elles ne sont pas entretenues avec le soin qu’elles exigent, autant valoit-il les laisser comme autrefois, garnies avec les ifs, les tristes cyprès, taillés sous les formes les plus bizarres.

M. le Blond, dans son Ouvrage, intitulé : La Théorie & la Pratique du Jardinage, distingue quatre sortes de plate-bandes. « Les plus ordinaires sont celles qui sont continuées tout autour des parterres, sans aucune interruption, qui sont labourées en dos d’âne, & garnies de fleurs d’arbrisseaux & d’ifs… La seconde espèce est une plate-bande coupée en compartimens d’espace en espace, par de petits passages ; on l’orne aussi de fleurs & d’arbrisseaux, & elle est en dos d’âne… La troisième espèce sont les plate-bandes toutes unies & plates, sans aucune fleur, avec simplement un massif de gazon au milieu, bordé de deux petits sentiers ratissés & sablés. On les orne quelquefois d’ifs, d’arbrisseaux, ou bien de pots de fleurs, posés sur des dez de pierre, & placés symétriquement au milieu du massif de gazon… Les plate-bandes de la quatrième espèce sont toutes nues & simplement sablées, ainsi que dans les parterres d’orangerie ; ce sont des caisses rangées par symétrie, qui remplissent ces plate-bandes, qui du côté des allées, sont bordées d’un trait de buis, & de l’autre, par le tapis & les pièces de gazon du parterre. Quelquefois on plante des ifs entre chaque caisse, pour rendre ces plate-bandes plus riches, & les parterres plus beaux pendant que les caisses sont serrées. »

» On voit aussi des plate-bandes adossées contre des murs, bordées d’un trait de buis, & remplies de grands arbres, tels que des tilleuls, des marronniers, &c. entre lesquels on met des ifs, des arbrisseaux & des fleurs de la grande espèce. »

» On fait des plate-bandes droites, circulaires, & à pans, dont on forme des volutes, des enroulemens, des massifs & des compartimens. »

» Tels sont les préceptes généraux donnés par le second patriarche des jardins symétriques ; heureusement l’on s’en écarte un peu aujourd’hui, & l’on ne voit plus d’ifs que dans les anciens jardins des moines.

Dans le temps que l’on raffoloit en France des nouvelles charrues, des nouveaux semoirs, aujourd’hui relégués sous la remise, il étoit grandement question de labourer par plate-bandes, afin que le sol d’un champ fût disposé & rendu aussi meuble que celui d’un potager. Tous ces essais, toutes ces expériences ont prouvé que la dépense excédoit le produit, & que toutes les fois que l’on met entre les mains du paysan des machines, & des machines compliquées, elles sont bientôt brisées, détruites & abymées. Je ne répéterai pas ici ce qui a déjà