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cules ou à de simples excroissances. Dans plusieurs cantons on rejette les coqs de cette espèce, parce qu’on les regarde comme moins vigoureux que ceux qui ont la crête simple. C’est une erreur, si le coq a d’ailleurs toutes les autres qualités requises. J’en ai la preuve certaine. Tous les coqs de la variété de Padoue, n°. 4, ont la crête bifurquée & aplatie.

Un coq suffit au service de 12 à 15 poules ; un plus grand nombre l’énerve. À trois mois il commence à cocher les poules & c’est trop tôt ; à quatre ans sa vigueur diminue, & la bonne ménagère ne le garde pas dans sa basse-cour. Les ergots annoncent son âge par leur longueur & leur dureté. On le connoît encore par les espèces d’écailles plus ou moins fortes de la pate.

Le rossignol & le coq sont les deux seuls oiseaux connus jusqu’à ce jour qui chantent pendant la nuit ; car on ne peut pas appeler un chant les sons que produisent les chouettes, les hibous, &c. Un bon coq annonce par son chant les heures de la nuit & il est plus sûr qu’aucune horloge. Il sort de grand matin du poulailler, & aussitôt après il examine si toutes les poules sont sorties ; sont-elles pendant le jour trop éparses & loin de sa vue, soit par jalousie, soit par attachement, il les rappelle & les rassemble ; sur le soir son chant annonce l’heure de la retraite, & jamais sultan au milieu de son sérail n’est obéi avec plus de ponctualité & d’attachement.

Le nombre des coqs doit être proportionné à celui des poules, & il vaut mieux en avoir un ou deux surnuméraires si la basse-cour est nombreuse, afin de réparer les peines qui peuvent avoir lieu ou par maladies ou par accidens.

Le peuple est persuadé que les coqs font des œufs, parce qu’on en trouve quelquefois de très-petits & sans jaune. Cette première erreur en a enfanté une autre ; un premier écart conduit au merveilleux ; de ces œufs mis à couvert dans du fumier ou autrement, naît ou un serpent, ou un basilic, ou tel autre animal aussi singulier. Il suffit, pour se convaincre de ces erreurs, de savoir que le premier œuf des jeunes poules est toujours très-petit, que dans le cas présent, le jaune s’est épanché en traversant l’ovis-ductus ; enfin qu’on trouve de semblables œufs pondus par des poules, quoique dans l’endroit, & loin de là, il n’y ait point de coq. Mais c’est trop s’arrêter à combattre un prétendu fait qui est contre toutes les loix de la nature, & pour qu’il fût reçu, il faudroit que le coq fût hermaphrodite, ce que personne n’a encore osé avancer. Voici à l’appui des erreurs un tour de main des charlatans, qui sert beaucoup à les accréditer, & de base à toute espèce de conte de leur part ;… si à un travers de doigt, près des os du crâne, on coupe la crête d’un coq, il se forme un vide dans le milieu des deux membranes extérieures, & si dans ce vide on place un jeune ergot de la grosseur d’une lentille, aussitôt après qu’on l’a coupé au pied d’un poulet, cet ergot maintenu par quelques points d’aiguille, s’adapte entre les deux membranes & s’y greffe tellement, qu’il y croît & s’alonge comme il l’auroit fait au pied du coq, & souvent beaucoup plus. C’est ainsi que l’on parvient à faire des coqs cornus.