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outres. Ces chenilles furent si abondantes en 1786, qu’elles ravagèrent presque tous les arbres fruitiers & la majeure partie des haies d’épine blanche ou aubepin. L’insecte parfait ou le papillon dépose ses œufs autour d’une branche d’arbre & encore plus souvent sur les bourgeons, tout a l’entour & par anneaux que les cultivateurs nomment bague (consultez ce mot), & en si grande quantité ; que quelquefois cette bague a un pouce de largeur. Lorsque les feuilles sont tombées, c’est l’époque à laquelle on doit visiter ses arbres, & les en détacher avec un instrument tranchant. Si on jette sur terre les débris, on court grand risque d’avoir travaillé en vain. On doit donc les rassembler soigneusement dans un panier, & ensuite les jeter au feu.

II. La chrysorrhoée est une phalène bombix ; sa larve est aussi redoutable que celle de l’espèce ci-dessus.

Les chenilles de cette espèce vivent en société, & dès le commencement du printemps elles dévastent tous les arbres. Elles sortent de ces coques blanches que l’on voit pendant l’hiver attachées en si grande quantité aux branches des arbres. Les premiers jours du vent du midi tant soit peu chauds suffisent pour les engager à sortir de leur coque ; mais elles y rentrent bien vite s’il survient du froid ou de la pluie. Enfin elles n’abandonnent entièrement leur première demeure que lorsque la belle saison est arrivée ; alors elles restent, pendant le jour comme pendant la nuit, dispersées sur les feuilles des arbres. Lorsqu’elles ont suffisamment pris de nourriture, elles se métamorphosent en papillons, qui déposent leurs œufs vers le milieu de l’été, & qui peu de temps éclosent & recommencent leurs ravages ; d’où il résulte que cette espèce fait mal deux fois l’année… On est tout étonné, après avoir rigoureusement fait écheniller ses arbres pendant l’hiver, de les voir de nouveau chargés de cet insecte ; on ne manque pas de dire alors, & c’est une opinion fort répandue, que ces insectes sont portés par les vents. Si on a détruit toutes les coques, on n’aura pas à coup sur la chenille chrysorrhoée ; mais l’échenillage des coques ne détruit pas les bagues d’où sort le neustria ou livrée ; voilà d’où provient le mal, & auquel on ne fait nulle attention : c’est plutôt fait d’imputer la transmigration de l’insecte a la force du vent.

III. Il est encore une larve plus dangereuse, sur-tout aux pommiers, c’est celle que von-Linné désigne ainsi, Phalœna œsculi, elinguis lœvis nivea, antennis thorace brevioribus, alis punctis numerosis cœruleo nigris, thorace senis. Cet insecte est d’autant plus nuisible, que l’insecte parfait dépose ses œufs entre l’écorce & le bois, & lorsqu’ils sont éclos, ils pénètrent dans l’intérieur de l’arbre, se nourrissent de la partie la plus tendre, vont jusqu’au cœur, & font presque toujours périr l’arbre, une seule larve suffit pour détruire un jeune pommier. On reconnoit l’ouverture qu’a fait la larve, & par où elle commence sa galerie souterraine, par les excrémens ou sciures de bois, qui sont au pied de l’arbre. On introduit dans cette galerie un fil de fer ou de laiton, rendu souple par le feu, & on l’enfonce jusqu’à ce que l’on soit parvenu à percer le ver, ce que l’on reconnoit à l’hu-