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une tranchée de dix-huit pouces de profondeur à l’un des bouts du sol consacré au semis, & chaque brin est détaché sans peine, sans meurtrissure, dans tout son entier. Les pépiniéristes n’ont rien de plus pressé que d’écourter les racines, de retrancher le pivot. Mon cher lecteur, je vous conjure avec la dernière instance de ne pas imiter cet exemple désastreux.

Après avoir défoncé à la profondeur de trois pieds le sol qui doit recevoir la porrette, on la replante en alignement & en quinconce à trois pieds de distance en tout sens ; les labours & les sarclages sont nécessaires pendant le reste de l’année comme pour les autres fruitiers. On peut greffer en écusson après la première année de plantation ; il est plus prudent d’attendre à la seconde, parce que le sujet a pris du corps & parce qu’il est mieux proportionné & plus en état de recevoir la greffe. Quant aux pommiers destines au plein vent, & qu’on veut greffer en tête, ainsi qu’il a été dit plus haut, il vaut beaucoup mieux attendre la troisième, & si le besoin l’exige, la quatrième. Ce cas est fort rare si le sol est bon & si l’arbre a été conduit comme il l’exige.

Rien de plus particulier pour la transplantation de cet arbre que pour celle des autres arbres fruitiers ; mais, je le répète, il ne faut jamais retrancher le pivot.

III. De la taille. Ce que j’ai dit plus haut en parlant des pommiers à cidre, s’applique à ceux-ci qui sont en plein vent ; quant à ceux en buisson, en espalier contre des murs & en espalier ou éventail, il leur faut la même conduite que pour le poirier. La seule différence consiste à réserver les côtés les moins bien exposés au soleil pour les pommiers en buisson & en espalier, à moins que l’on n’habite un pays naturellement froid. Si le terrain favorise la végétation du pommier, s’il lui convient, les arbres destinés à former l’espalier ou l’éventail doivent être espacés de 25 à 30 pieds ; quelques pieds de moins pour ceux qui donnent peu de bois. Je parle ici du pommier greffé sur franc & même en général sur doucin ; quant à ceux sur paradis, l’espace doit être proportionné à leur foiblesse. Un amateur n’établira jamais un bel espalier avec du paradis. Ce dernier mérite d’être relégué dans quelques coins ou dans de petites portions de terrain où un pommier sur franc & même sur doucin ne trouveroit pas à s’étendre. La majeure partie des espèces de pommiers pousse avec une vigueur étonnante, & leurs bourgeons demandent à être étendus sur toute leur longueur. On doit tout au plus arrêter seulement leur pointe, & disposer toutes leurs pousses sur l’angle de 45 degrés. En suivant cette méthode, en ne conservant que quatre mères branches, disposées sur cet angle, on parviendra, en peu d’années, à avoir des espaliers de la plus grande beauté. Si au contraire, & suivant la pratique journalière, on laisse des branches perpendiculaires, les gourmands domineront (consultez ce mot), épuiseront inutilement la sève, & les branches latérales prendront peu d’étendue. Si on fixe les jeunes branches sur des lignes horizontales, il faudra beaucoup plus de mères branches, & l’arbre sera non-seulement trop chargé de gros bois, mais encore ces branches horizontales