Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/250

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

depuis le dernier binage : on l’exécute ou à l’aide de la houe ou de la charrue ; la terre renversée de droite & de gauche rechausse le pied, en sorte que le terrain qui étoit élevé devient creux.


Section XIII.

Récolte des Pommes de terre.

Après qu’on a ainsi sarclé & butté la pomme de terre, on est dispensé de tout autre soin jusques à la récolte. Elle peut commencer à se faire dès le mois de juillet, & se continuer jusques au mois de novembre : cela dépend des espèces, du climat, du terrain & de la saison. Il arrive souvent que le besoin ou l’amour des primeurs les font arracher avant qu’elles ne soient parfaitement mûres, & qu’on les mange avec une sorte d’avidité, sans que leur usage soit suivi d’aucuns inconvéniens. Les anglois en sont si friands, qu’on voit ces tubercules dans les marchés de Londres lorsqu’à peine ils sont formés, ainsi que beaucoup d’autres racines. On enlève les plus grosses, en fourrant la main sous le pied sans remuer la plante ; on couvre ensuite le trou avec le plus grand soin ; elle n’en continue pas moins sa végétation jusqu’au véritable moment de la récolte ; mais il faut éviter d’opérer durant les grandes chaleurs.

Coupe des tiges. On peut tirer quelque parti du feuillage de la pomme de terre ; mais il y a un moment à saisir pour faire ce retranchement sans nuire à l’accroissement des racines, & c’est au commencement de septembre, après que les baies ou fruit sont formés ; encore ne faut-il le faire qu’à huit pouces environ de la surface, & sur l’espèce grosse blanche, parce que c’est celle dont la feuille foisonne le plus, & qui paroît supporter ce retranchement sans aucun danger ; les autres variétés, & surtout les rouges, en souffriroient beaucoup.

Maturité. Les signes auxquels on peut reconnoître que les pommes de terres sont mûres, c’est lorsque les tiges, après avoir acquis toute leur étendue, jaunissent & se flétrissent d’elles-mêmes sans accident, ce qui arrive, pour la plûpart des espèces, à la fin de septembre ou dans le courant d’octobre ; alors l’accroissement des racines cesse, & elles ne végètent plus : si on les laissoit demeurer longtemps en terre, passé cette époque, & que la saison continuât d’être douce & humide, les racines chevelues qui unissent ensemble les tubercules, se dessécheroient bientôt, & ceux-ci, livrés à leur propension naturelle de végéter, recommenceroient à germer & contracteroient les mauvaises qualités qu’elles ont en cet état : on le répète, les pommes de terre dont le feuillage est flétri par les gelées blanches d’octobre, ou par la maturité, ne sauroient plus grossir ni végéter à leur profit, & si le temps le permet, il ne faut pas différer de les récolter.

Leur récolte. Elle s’exécute au moyen des animaux ou à bras d’hommes : la charrue déchausse assez promptement les racines, & met en rigoles ou raies ce qui étoit en sillons en jetant dehors les pommes de terre que des enfans ou des femmes détachent des filets fibreux qui les attachent ensemble, & les ramassent dans des paniers. L’outil le plus com-