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temps pluvieux. Les voyageurs attribuent ces effets à la chaleur, & les botanistes, à l’humidité ; mais on s’est convaincu du contraire.

On a vu ci-dessus, que la même chose arrive aux plantes qui sont dans des serres chaudes, où la chaleur est toujours la même. J’ai arrosé quelques plantes au point de les noyer, j’en ai laissé d’autres à sec, & je n’y ai apperçu aucun changement. Les feuilles se sont ouvertes & épanouies le matin, & se sont fermées le soir à la même heure, & au même degré.

Il suit de là que deux de ces quatre agens naturels, la chaleur & l’humidité, n’ont aucune part à cet effet. L’air est trop universel, & dépend trop de celles-ci pour pouvoir l’admettre dans notre examen ; il faut donc s’en tenir à la lumière, & je me suis convaincu par plusieurs expériences, que le changement de position dans les feuilles des plantes, dans les différens périodes du jour & de la nuit, provient de cet agent.

Prenons pour exemple de cet effet une des plantes d Égypte, parce que l’action de celles-ci est plus sensible, sur-tout dans l’abrus.

La feuille de cette plante est composée de 13 paires de lobes, attachées par des pétioles courts & minces au pétiole général, & celui-ci à la tige de la plante. En examinant la structure interne avec le microscope, on apperçoit nombre de fibres délicates, qui naissent du centre de la principale tige, & qui montent obliquement à travers les parties intermédiaires, jusqu’à la surface extérieure de l’écorce. Elles grossissent en cet endroit, se répandent en descendant de chaque côté, & forment sous l’enveloppe de la tige, la base du pétiole commun ; de là elles montent sous la forme d’un petit faisceau serré vers l’extrémité de la côte ; & comme il n’y a point de lobe interne pour terminer la feuille, elles se terminent en une pointe couverte par les tégumens communs. De chaque côté de cette côte du milieu naissent les pétioles des lobes séparés ; ils sont formés d’une multitude de petits vaisseaux extrêmement serrés & renfermés dans une enveloppe, qui est une continuation de l’écorce de la plante. Il y a à la base de chaque lobe un autre faisceau de fibres qui vont aboutir à son extrémité, & qui envoient des branches minces dans les différentes parties de la feuille. Cette description des parties sert à expliquer le changement qu’éprouvent les lobes dans leur position & sous les différentes influence de la lumière.

La lumière est un corps subtil, actif & pénétrant ; la petitesse de ses parties, fait qu’elle pénètre les corps, & son mouvement est si violent qu’elle produit sur eux les changemens les plus étranges. Ces effets ne sont point durables, parce que les rayons qui les occasionnent se perdent & s’amortissent… Les corps peuvent agir sur la lumière sans la toucher, parce que les rayons se réfléchissent lorsqu’ils en approchent ; il n’en est pas de même de la lumière, & ses rayons se perdent lorsqu’elle vient à les toucher. Le changement que produit la lumière dans la position des feuilles, est l’effet du mouvement qu’excitent ses rayons dans leurs fibres ; mais il faut pour