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aux moyennes, ou celles-ci aux petites ? c’est à l’expérience à répandre du jour sur ces questions : tout ce que nous pouvons avancer contre l’opinion de plusieurs auteurs qui ont écrit, les uns, qu’il falloit mettre jusqu’à trois pommes de terre dans chaque trou, les autres, qu’on pouvoit diviser chacune en sept ou huit parties, pourvu que chaque partie eût un œilleton, c’est que les uns & les autres ont donné dans les excès contraires : car il est bien constaté qu’une seule pomme de terre suffit toujours, & que quand elle a un certain volume, il est avantageux de la diviser en plusieurs quartiers, & de laisser à chaque quartier deux ou trois œilletons, sur-tout quand on a le ver du hanneton à redouter : malheur alors à ceux qui n’ont planté que des morceaux garnis d’un seul œilleton, ils courent les risques de n’avoir aucune récolte. Les expériences de M. de Chancey & les miennes paroissent même prouver que les espèces rondes ne veulent as être autant divisées que les longues ; mais peu importe, pour le succès de la plantation, que le morceau soit placé d’une manière ou d’une autre ; le germe futur prendra toujours une direction verticale.

On peut donc diviser une pomme de terre jusqu’en sept ou huit parties, suivant sa grosseur & sa forme, mais ce doit toujours être en bizeau, & non par tranches circulaires, afin de moins endommager le germe, de manière qu’elle présente plus de surface du côté de l’écorce ; un seul morceau rendra autant de pommes de sorte que si l’on plantoit la racine entière, ce qui est une économie considérable : l’ouvrier le moins intelligent peut en une heure découper trois boisseaux, c’est-à-dire, environ trois septiers par jour.


SECTION X.

Du temps de faire cette plantation.

C’est depuis le 15 mars jusqu’à la fin d’avril qu’il faut songer à la plantation des pommes de terre, & même plus tard dans les provinces méridionales. La grosse blanche tachée de rouge peut encore arriver à maturité lorsqu’elle n’est mise en terre qu’au commencement de juin, & c’est une ressource dont il est possible de tirer parti lorsque le printemps a été fort sec, & que le fourrage est rare.

L’année rurale 1785, si remarquable par l’extrême sécheresse du printemps qui a occasionné la perte d’une partie des bestiaux, a prouvé que parmi les supplémens indiqués pour leur nourriture, la pomme de terre, spécialement recommandée, a rempli le plus complètement les espérances, puisque ces racines, plantées bien après la saison, n’en ont pas moins prospéré dans des terrains où les menus grains avoient entièrement manqué. Cette plante peut donc être employée avec grand profit après l’ensemencement de mars, occuper encore les charrues & les bras dans un temps où les travaux de la campagne sont suspendus ou moins actifs.