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ture, il prépare pendant le printemps, l’été & l’automne, une certaine masse de terrain pour remplacer celle de l’abri, à peu près à un pistil de profondeur sur la longueur qu’il désire ; s’il peut se procurer la terre de la superficie d’un pré que l’on a défriché, c’est la meilleure : si à la terre que l’on prépare on donne quelque engrais animal, il doit être très-consommé & réduit en terreau, car les fumiers nouveaux nuisent aux racines. Il n’en est pas ainsi si on place ces fumiers sur le sol après que la plante est levée. Le mieux est de renouveler la terre par d’autre terre.

Les meilleurs abris sont ceux du levant & du midi, & si on n’en a pas, il faut en produire d’artificiels par le moyen des paillassons & en formant des ados avec la terre. On n’obtiendra jamais de primeurs dans un sol plat, à moins qu’il ne soit abrité par un mur, par un rocher, &c. & ils réussiront encore mieux si ce sol est lui-même incliné, ou naturellement, ou par le secours du cultivateur. En hiver le soleil darde très-obliquement ses rayons sur les sols plats ; sur les inclinés ils tombent plus perpendiculairement, dès lors leur chaleur est plus forte & plus active. L’exemple de la neige prouve cette affection ; elle fond presqu’aussitôt sur un terrain incliné, & beaucoup plus tard sur celui qui est plat quoique l’abri soit le même.

Dans les terres légères & sablonneuses, on sème au commencement de décembre, & à la mi-novembre dans les terres franches & fortes. Quelques-uns sèment par touffes de six à huit pois, à la distance d’un pied chaque touffe, & les autres par rayons allez épais. Cette dernière méthode est préférable, puisqu’elle facilite le sarclage. Dans l’un & dans l’autre cas, si la terre est légère, on la marche après l’avoir semée ; précaution inutile dans les terres fortes, parce qu’elles se serrent assez après la première pluie. Aussitôt après avoir semé, on couvre le sol avec du terreau gras, des débris de végétaux mêlés avec la fiente de pigeon, de volaille, &c., ou avec des boues des villes.

Lorsque les pois sont sortis, on se hâte de regarnir les places vides, & de réchauffer chaque pied avec l’engrais indiqué ci-dessus. Si la saison est belle, si elle se soutient, si les plantes prennent de la force & de la hauteur, on doit les réchauffer de nouveau autant de fois que le besoin l’exige. Le cas est assez rare dans nos provinces du nord, & assez commun dans celles du midi, où le soleil conserve beaucoup plus d’activité, & où il paroît bien plus souvent.

Ces pois craignent singulièrement les gelées. On doit donc, même avant de les semer, de peur d’être surpris, préparer les perches, les paillassons, &c., & pendant le froid, les couvrir de la même manière que les pois semés pour l’arrière-saison, ainsi qu’il a été dit dans l’article précédent, avec cette différence cependant, qu’au lieu de disposer les perches sur des cerceaux, on leur donne une forme inclinée, dont la partie la plus basse est sur le devant ; en un mot, il faut établir une espèce de toit. On doit, aussi souvent que la saison le permet, lever ces paillassons afin de renouveler l’air, prévenir l’étiolement, la jaunisse & la fonte des plantes. Les longues pluies leur