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mais celui-ci est le fourrage le plus sain & le meilleur pour les agneaux qui le mangent préférablement à tout autre fourrage. Cette dernière espèce ne couvre point, il est vrai, si bien la terre que l’autre, ni ne la touche pas de si près, ni ne donne point une récolte aussi abondante en tiges & en feuilles, & cependant elle a des avantages sur l’autre : nous avons dit qu’elle valoit mieux pour le petit bétail, & nous ajouterons en sa faveur, ce que peut-être peu de personnes ont observé, qu’elle pousse plus vite que l’autre… Le gros pois chiche est plus propre à être fauché, & le petit a être mangé sur le terrain, raison de plus qui doit déterminer à le semer préférablement en rayons. Le pois chiche d’hiver est celui qui rend le plus, parce qu’il est fort précoce, qu’il donne du fourrage, & rend pendant que tous les autres manquent : son grand désavantage cependant porte sur l’incertitude de son succès, car il arrive très-souvent que tout le champ périt par les gelées. On voit très-souvent cette plante résister pendant tout l’hiver & périr en février ou dans les premiers jours de mars par les gelées qui surviennent après des jours chauds… D’un autre côté, il faut observer que la semaille du printemps est toujours sûre : il n’y a pas de meilleur fourrage pour les chevaux que le pois chiche fauché, ils le mangent avec plaisir. Il produit d’abord dans ces animaux l’effet du fourrage vert, mais après quelques jours d’habitude, il n’est point de nourriture qui les entretienne mieux en chair. Ce fourrage est également propre à engraisser les bêtes à cornes & particulièrement les vaches, parce qu’en même temps qu’il les engraisse, il les fait abonder en lait qui n’a pas le mauvais goût qu’il contraire quelquefois lorsque ces animaux sont nourris de certaines autres plantes des prairies artificielles… Il ne présente pas moins d’avantages pour la nourriture des brebis, elles s’engraissent & fournissent à leurs agneaux un lait nourrissant & délicat. On ne connoît point encore assez toute l’utilité de cette plante ; elle est de toutes celles qui ont été mises nouvellement en usage, celle qui mérite le plus l’attention du cultivateur ; l’Angleterre commence à peine à connoître tout son prix qui est entièrement ignoré en France, cependant on peut assurer qu’il seroit à souhaiter que l’usage en devint universel.

II. Culture des Pois hâtifs. On en reconnoît deux espèces, celle de luxe & celle d’utilité. La première ne peut avoir lieu que dans les environs de Paris, où tout l’argent du royaume va s’engloutir ; la seconde est pour les provinces, où l’on mange d’excellens pois parce que l’art se contente d’aider les efforts de la nature sans les contrarier.

1. De la culture de Luxe. Les pois Michaud, Baron, Domine, sont les plus hâtifs ; ils portent chacun le nom du cultivateur qui les a découverts, & ils sont ici rangés par ordre de leur précocité. M. de Combes, auteur de l’excellent Ouvrage intitulé, École du Jardin potager, décrit ainsi la méthode qu’il faut suivre.

« Ceux qui ont un grand emplacement pour ce légume, & qui sont en état de faire certains frais, peuvent se donner le plaisir d’en jouir un mois plutôt que ceux qui sèment en pleine terre, malgré les abris & les soins. »