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c’est qu’elle n’est blanche & opaque que dans sa totalité.

La blancheur de la neige peut être conçue de la manière suivante : elle renvoie la lumière avec beaucoup de force, quoiqu’elle ne soit que de la glace, dont chaque particule est transparente lorsqu’on l’examine de près ; il semble que presque toute la lumière, bien loin d’être réfléchie, devroit plutôt passer à travers les pores qui se trouvent entre chaque particule. Cependant, dès qu’on vient à considérer avec attention ces petits espaces intermédiaires, on apperçoit qu’ils sont d’une figure fort irrégulière, ce qui contribue à la réflexion des rayons de la lumière ; il en est ici comme du verre le plus transparent que l’on réduit en poudre ; car il est aussi blanc que la neige, & les parties dont il est composé sont aussi transparentes lorsqu’on les examine en elles-mêmes.

La froideur de la neige n’a rien de particulier en général ; la neige & la glace sont également froides, soit dans l’instant de leur formation, soit après qu’elles se sont formées, toutes les circonstances étant d’ailleurs les mêmes ; mais lorsque la neige est rassemblée en tas, il paroît qu’elle conserve une température plus douce qu’à la surface. On lit dans les Mémoires de l’académie des sciences, le détail des expériences de M. Guettard, qui tendent à prouver qu’il fait moins froid sous la neige qu’à l’air extérieur, & que plus le monceau est épais, plus le thermomètre qu’on plonge au bas de cette masse se tient au-dessus de zéro. C’est ce que les perdrix semblent avoir appris de la nature. Ces oiseaux se cachent en hiver sous la neige, & on les y chasse avec des chiens dressés. Les hommes pris de la nuit en voyageant, se forment des cabanes de neige où ils passent les nuits les plus froides, sans avoir rien à craindre de leur rigueur.

Économie rurale.

L’assertion d’un chimiste qui dit avoir découvert du nitre dans la neige, ne trouve guères plus de défenseurs ; & si on n’avoit à alléguer que cette substance saline, pour prouver l’influence de la neige sur la végétation, la question seroit bientôt terminée : mais on a des faits beaucoup plus positifs, déduits de l’observation, & que la composition même de la neige peut faire présumer. On ne peut nier en effet, que la neige, comme cristallisation, ne contienne beaucoup d’air, outre l’eau qui est son autre principe : or, ces deux élémens sont les grands agens de la végétation. Il est constant d’ailleurs, que la neige contribue à la fertilité de bien des terres, & à l’accroissement d’un grand nombre de végétaux. Les années où il tombe beaucoup de neige, sont toujours abondantes, & les montagnes que la neige couvre perpétuellement, sont chargées à leur base, sur leur adossement & dans les prairies, des plantes les plus vertes & les mieux nourries.

On en trouve des exemples frappans dans les montagnes de la Laponie. Les bases ou les parties inférieures de ces montagnes, sont couvertes de forêts épaisses ; les parties moyennes qui succèdent à ces dernières, outre des collines nues, hérissées & sablonneuses, offrent des plaines & des vallons qui contiennent une