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de manière qu’il faut se servir d’échelles pour faire les dernières entailles. Nous avons dit que l’on n’étendoit que peu à peu les entailles, tant en superficie qu’en profondeur, c’est pour n’endommager les arbres que le moins qu’il est possible ; d’ailleurs, quelque peu que l’on emporte de bois, cela suffit pour faciliter l’effusion de la résine.

Il est assez indifférent de quel côté que l’on fasse les entailles ; les ouvriers se décident principalement d’aprés la forme du tronc de l’arbre, la situation du terrain & la commodité qu’ils auront pour faire les fosses. Cependant, comme c’est dans le temps le plus chaud de l’année que le suc coule en plus grande abondance, du moins en Canada, on doit en conclure que quand le soleil peut porter sur les arbres, il y auroit de l’avantage à choisir le côté du midi pour faire ces entailles.

Lorsque les fosses se trouvent remplies d’une certaine quantité de suc résineux, on le puise avec des cuillers de fer ou de bois, & on le verse dans des seaux pour le porter dans une auge creusée dans un gros tronc de pin, & qui peut contenir trois ou quatre barrils.

On tient cette auge élevée sur des trétaux, afin de pouvoir placer des seaux au-dessous, pour en retirer la substance résineuse, & pour cela on n’a qu’a déboucher un trou pratiqué au fond de l’auge & fermé avec un tampon de bois.

Enfin, quand on a suffisamment ramassé de ce suc résineux, on lui donne une cuisson qui le convertit en brai sec ou en résine ; pour cuire le suc résineux, on monte une chaudière de cuivre rouge, capable de contenir une barique de liqueur, sur un fourneau qu’on bâtit ordinairement d’un mélange de glaise, de sable & de foin. On a grande attention que les bords de ce fourneau soient bien exactement joints avec la chaudière, afin que la fumée du bois ne puisse pas se mêler avec celle de la matière résineuse, car sans cette précaution la chaleur du fourneau mettroit immanquablement le feu à la résine, & l’on courroit grand risque de tout perdre : c’est encore dans la vue de prévenir le feu, que l’on pratique à la bouche du fourneau par laquelle on met le feu, un canal voûté, ou une espèce de galerie de quatre à cinq pieds de longueur, terminé par un mur de terre, épais, & qui s’élève de cinq à six pieds ; moyennant ces précautions on empêche les vapeurs brûlantes & la fumée du bois de se mêler avec la fumée de la chaudière.

Quand tout est ainsi disposé, on ouvre le trou de l’auge où l’on a déposé le suc résineux, on le fait couler dans des seaux qui servent à le transporter dans la chaudière ; lorsque la chaudière est presque remplie, on entretient un feu modéré dans le fourneau avec du bois bien sec ; on fait bouillir le suc résineux environ pendant cinq à six heures, & l’on a soin de le remuer continuellement avec une grande spatule de bois, afin d’empêcher de brûler les ordures qui tombent au fond de la chaudière : on prétend que si l’on négligeoit cette précaution, la matière s’enflammerait, & il seroit alors très-difficile de l’éteindre.

Pour reconnoître si la substance