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feuilles sont larges, épaisses, luisantes, la prolongation du pétiole sur la feuille est rougeâtre ; cet arbre s’élève très-haut.

8. Peupller-baumier ou Tacamahaca. Populus balsamisera. Lin. Feuilles très-grandes, ovales, en forme de cœur oblong, crénelées, nues a leur base ; leur première couleur est d’un jaune vif, ensuite d’un vert clair, enfin d’un vert brun ; le dessous de la feuille est d’un blanc sale, mat & un peu jaune ; leurs pétioles sont cylindriques ; lorsque les feuilles sont nouvelles, elles sont gluantes ; les boutons le sont beaucoup plus ; leur odeur est balsamique ainsi que celle des bourgeons ; sa résine a une odeur d’ambre gris. Cet arbre originaire de la Caroline s’élève beaucoup dans son pays natal & beaucoup moins en France.


CHAPITRE II.

De la culture des peupliers, & de leurs propriétés.

On les multiplie ou par plançons, ou par marcottes, ou par la greffe, ou par les plants enracinés.

Le Peuplier blanc est le plus précieux de tous ceux de cette famille. Il exige moins que les autres les terrains frais ou humides. Son bois est doux, liant, susceptible d’un bon poli, & il est presque le seul bois employé dans les provinces du midi pour les boiseries des portes, des fenêtres, des châssis, & des meubles ; il n’est point sujet à se jeter, & il dure pour le moins autant que le sapin exposé à l’air, si on a eu la précaution de l’enduire d’une couleur à l’huile. Plusieurs auteurs disent qu’on peut le multiplier de boutures ; cela peut être & même cela doit être puisqu’ils le disent ; mais je dirai que je l’ai essayé inutilement, même en le faisant arroser au besoin. Peut-être cette facilité de jeter des racines, tient-elle au climat, & celui du nord lui est-il plus avantageux. La multiplication réussit parfaitement par marcottes & par couchées. On a rarement besoin de recourir à cet expédient ; il vaut beaucoup mieux couper un gros arbre par le pied, alors, comme ses racines tracent très au loin, il sort des rejets de toutes parts. Il est même très difficile de purger un champ, d’empêcher la crue subite des rejets, lorsqu’une fois les racines s’en sont emparées. On peut dire qu’on a un bois éternel qui brave les intempéries de toutes les saisons.

Par la plantation on n’est pas également assuré de la réussite ; cependant, si elle est bien conduite, l’arbre reprend facilement. Le grand point est de ménager les racines & de ne planter aucun pied qui ne soit fortement garni de chevelus ; la fosse doit être proportionnée à leur volume & à leur étendue. Si c’est un bois qu’on veut former, si on désire avoir des arbres à gros troncs, il convient de les espacer de deux à trois toises, selon la qualité du sol ; de six à neuf pieds si l’on veut faire un fourré, & à six pieds pour un taillis. Quatre toises de distance suffisent pour les avenues. Dans les provinces du midi cette plantation demande à être faite aussitôt après la chute des feuilles, afin que les pluies d’hiver aient le temps de consolider la terre contre les racines ; si on a de l’eau dans le voisinage, si on peut arroser avec facilite, l’on peut plan-