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& les ligatures sont employés pour les arbres dans les cas de dislocation des branches, fractures & autres dérangemens forcés. Personne n’ignore comment on peut & comment on doit faire un pareil pansement.


Section II.

Inventions particulières pour modérer la séve, former les arbres, & leur faire rapporter du fruit.

Voici plusieurs moyens très-utiles qui conduisent à cette fin.

1°. La courbure des branches. Je voulois (c’est M. Schabol qui parle) conserver vers la mi-juillet un gourmand pour en faire l’année suivante la base d’un des côtés d’un arbre, je m’avisai de le courber & de le coucher presque le long de la muraille, qu’il surpassoit de beaucoup. Pour lui faire place, je dépalissai entièrement la branche sur laquelle il avoit poussé, & que je me proposois de supprimer à la taille suivante, afin de la remettre sur ce gourmand ; je vis les yeux à bois de ce dernier, se convertir en boutons à fruit dans tous les bourgeons de la branche mère ; ainsi forcée & en moins de trois semaines, le changement se fit. Au gourmand courbé & surbaissé, il se forma autant de lambourdes qu’il y avoit d’yeux dans le bas, & ces lambourdes taillées l’année suivante, donnèrent beaucoup de fruits ; c’est de là que m’est venue l’idée de la courbure des branches. Ce n’est autre chose que l’action de courber à propos & forcément une ou plusieurs branches, à dessein d’arrêter la séve pour la faire refluer dans d’autres. Un pêcher, par exemple, ne pousse que d’un côté, il s’emporte du haut ; le reste laisse voir la muraille toute dégarnie ; je courbe alors les rameaux trop vigoureux, & je laisse les autres s’étendre en liberté ; bientôt le fort est subjugué & le foible ne tarde point à l’égaler. Toutes sortes d’arbres & de branches qui ont de la séve, sont susceptibles de la courbure. Les saisons du printemps & de l’été, sont les plus propres à cette opération, qui a lieu principalement à l’égard des branches-mères & des gourmands.

Cette méthode de courber ainsi les branches, est utile 1°. quand après avoir taillé long plusieurs gourmands des années précédentes, ils continuent de prendre toute la séve ; 2°. à l’égard des pêchers plantés trop près les uns des autres : je force alors les bourgeons en contre-bas à commencer depuis la première branche, & toujours en remontant ; 3°. pour les arbres qui ont atteint le haut du mur & s’emportent au-dessus du chaperon : bien loin de couper leurs branches par les bouts, je les courbe toutes & je les arrange près l’une de l’autre sous le larmier, en forme de cordon ; & vers la fin d’août, si leur confusion est trop grande, je les arrête par les extrémités sans aucun risque. Ces arbres pousseront par la suite plus modérément & n’auront point été épuisés.

2.° Navrer les branches. En terme de jardinier, de vigneron, de treillageurs, &c. c’est donner un coup de serpe à un bois qui n’est point droit, & y faire une entaille en biais pour peser dessus, afin que sa partie la plus longue monte sur la plus petite. C’est d’après cette opération que j’ai essayé de dompter des arbres trop vigoureux en leur faisant, de